LUC WISE & MAGALI FAGET : « L’AVENIR DU FINANCEMENT DES ONG »

avenir financement Melle Pitch

Chaque année, les Mlle Pitch Awards récompensent les meilleures créations publicitaires de la jeune garde. Rencontre avec le président du jury, Luc Wise, et avec la directrice de l’agence Mlle Pitch, Magali Faget.

Votre rencontre avec le concours Mlle Pitch ?
Luc Wise : Je me souviens très précisément du jour où – à l’été 2022 – en voyageant de Paris à Biarritz en train, j’ai vu la campagne pour la Croix Rouge avec la console de jeu. J’ai trouvé que c’était une initiative forte, de la « communication for good », qui m’a directement parlé en tant que Président et fondateur de The Good Company (agence de communication également spécialisée dans les grandes causes, ndlr).

Le brief pour l’édition 2025, qui vise à promouvoir le Samusocial de Paris, donne les méthodes à proscrire : le ton grave ; être culpabilisant ; créer des visuels dégradants ; dénoncer l’inaction des pouvoirs publics. Quels sont les éléments d’une bonne publicité pour le Samusocial ?
Magali Faget : C’est toute la prouesse créative : dénoncer la difficulté de vivre à la rue sans utiliser un ton alarmiste, tout en respectant la dignité de ces personnes.
L. W. : L’indignation ne vaut que si elle est suivie d’actions. Or, une bonne publicité pour le Samusocial doit à la fois sensibiliser, mais aussi inciter à agir, donner, faire. Poser le problème, mais aussi suggérer des solutions.

Le public cible de cette année : les plus de 35 ans. Par quoi se caractérise-t-il ?
M. F. : Les donateurs habituels des ONGs sont majoritairement plus âgés, mais leur pouvoir d’achat tant à se réduire considérablement. Il faut donc rajeunir la cible des donateurs pour miser sur l’avenir du financement des ONGs, et viser des donateurs jeunes, actifs, en utilisant des codes qui leur parlent. Cette année, les campagnes qui ont été primées seront diffusées massivement dans le métro et les gares de France. Elles jouent avec les modes de consommation ou de loisirs des jeunes actifs, telle la campagne « L’ Avis de la rue », qui rebondit sur nos habitudes de tout notifier par des avis Google.

Comment engager le don par la publicité ?
M. F. : En montrant d’une part l’utilité de son don et du combat de la cause mais aussi en ciblant les bons canaux de communication. Aujourd’hui, plus de 35 % de la collecte se fait sur le digital. Le concours Mlle Pitch Awards a démontré l’efficacité de ses campagnes, puisque plusieurs d’entre elles ont généré des dons importants.
L. W. : Les neurosciences ont démontré que nos actions sont avant tout émotionnelles. Trop souvent les associations et les agences de communication séparent la partie « communication et publicité », de la partie « marketing direct et fundraising ». Or, le marketing et la communication, le rationnel et l’émotionnel vont de pair.

Y a-t-il une esthétique générale qui s’est dégagée des candidats de cette édition ?
M. F. : Cette année le concours célèbre ses cinq ans et nous avons reçu la meilleure shortlist créative depuis sa création. L’ADN créatif du concours est de sortir des codes habituels de communication des ONGs, en primant des campagnes qu’elles ne diffuseraient pas spontanément, parce que trop modernes ou trop interpellantes.
L. W. : Beaucoup d’acteurs économiques sont aujourd’hui obnubilés par les promesses de l’IA. Elles sont certes prodigieuses, et il y a des belles campagnes qui ont fait appel à de l’IA dans la shortlist. Mais il y aussi des jeux d’acteurs, de l’illustration, des choses tristes et des choses drôles. Vive la diversité !

mlle-pitch.com

Par Paulina Beaudle