ZOMBIES TURQUES ET FANTOMES JAPONAIS A GERARDMER

Au festival du film fantastique de Gérardmer, beaucoup de sorcières, des mâles palus vraiment alpha et quelques fantômes japonais énervés.

Le 31e festival de Gérardmer commence tout doucement. Génial réalisateur de Ring (1998) et de Dark Waters (primé ici en 2003), Hideo Nakata n’est plus que l’ombre de lui-même et signe une nouvelle histoire de fantômes (une femme mariée très jalouse de son mari insignifiant). Le scénario ne tient absolument pas la route, les acteurs surjouent, miment l’effroi en écarquillant les yeux comme au temps du muet et Nakata se plante avec des scènes burlesques qui détonnent à côté des moments d’effroi. À fuir… 

Kaidan


La première bonne nouvelle de Gérardmer vient de Turquie. Dans The Funeral, un chauffeur de corbillard va se lancer dans un beau road trip avec une morte-vivante, tuée suite à un crime d’honneur. Très vite, le chauffeur taciturne tombe amoureux de la belle zombie et va commencer à découper en morceaux les malheureux qui croisent leur route et les mettre dans des Tupperware, afin de nourrir la belle à la faim inextinguible. Pour son deuxième long-métrage, le cinéaste turc, Orçum Behram, né en 1987, fait preuve de l’assurance d’un vieux routier de l’horreur. Il génère un tension qui monte crescendo, filme une série de séquences d’horreur vraiment frontales, s’essaie à l’humour avec succès, et s’offre un final ultra-graphique et supérieurement mis en scène. C’est étrange, gore, poétique et parfois très beau. Un vrai choc.

FANTÔMES JAPONAIS ET BUTŌ

L’autre choc du festival, c’est un doc absolument merveilleux de 90 minutes, Kaidan, histoires étranges de fantômes japonais. Aux manettes, un des meilleurs spécialistes du cinéma asiatique, Yves Montmayeur, déjà auteur de docs sur Kitano, le cinéma de yakuza, mais aussi sur Haneke ou le cinéma belge. Grâce à de sublimes archives filmées depuis plus de 25 ans, Montmayeur donne la parole à Hideo Nakata, Takashi Shimizu (Ju-On) et les maitres de la J-Horror. C’est bien sûr passionnant mais Montmayeur dépasse bientôt le médium cinéma pour s’interroger sur ce mythe qui a traversé les siècles. Il rencontre des artistes et photographes fascinés par les ectoplasmes, propose une balade dans la forêt des suicidés et ouvre les portes d’un Japon secret et inquiétant. Encore plus fort, il se penche sur le manga et surtout le butō. Et l’on découvre – interdit – que Sadako, le fantôme chevelu de Ring, doit sa démarche saccadée aux danseurs traditionnels de butō. Les images de danse ou les interviews des artistes sont exceptionnelles, et certains danseurs avouent qu’ils ont incarné des fantômes dans des films ou des jeux vidéos. Hautement recommandé.


The Funeral
, d’Orçum Behram
Kaidan, histoires étranges de fantômes japonais, d’Yves Montmayeur


Par Marc Godin