PHILIPPE KATERINE, POP-STAR 1.0 : « SOYONS IRREMPLAÇABLES »

Si jamais le maître du monde Elon Musk finit par sortir son humanoïde, gageons qu’il ne ressemblera pas à notre Philippe Katerine national. Versatile, touchant et kitsch, il érige l’absurdité et la nonchalance en art. Artiste trop humain, il a bien voulu nous donner une leçon en non-productivité.  

Arrivé dans une voiture à son effigie (on n’en attendait pas moins de lui) ayant parcouru Paris le temps de son expo « Mignonisme » au Bon Marché Rive Gauche, notre coverstar pluridisciplinaire Philippe Katerine nous rejoint en nous confiant qu’il avait bien avalé ses plusieurs bananes au petit-déjeuner. Pendant deux heures, posé dans un coin calme du quartier Montorgueil, ce personnage singulier et attachant de la french pop est revenu sur cette carrière à part qu’il mène depuis 30 ans. D’ailleurs, il a son avis sur les robots : déjà en 2005, il sortait son album Robots après tout, réponse taquine au « Human After All » des Daft. Lui poursuit une carrière « à l’ancienne », mi-amuseur ORTF, mi-indie kid resté twee. Pour découvrir de quelle planète il est originaire, il fallait se rendre à l’expo qui se tenait au Bon Marché ce printemps : tout y était rose, peuplé de bonhommes géants se nourrissant uniquement de guimauves au céleri avec, toujours, un fond sonore de pop inquiétante. En marge de son temps, ce qui est sûrement un des secrets de sa réussite, il coupe son iPhone pour nous en dire plus…

Tu mènes une coisade pop, de manière plutôt artisanale, depuis 30 ans. Que t’inspire le futur que nous promettent Musk et Bezos ?
Philippe Katerine : Le passé m’effraie , le futur tout autant, seul compte le présent. Ma vision du futur est donc très limitée, j’y vais comme dans la nuit. Tout ce qu’on peut faire, c’est essayer d’être irremplaçables. Présentement, être assisté par mon téléphone, avec le monde entier dedans, ça m’arrange bien. Et je passe  de merveilleux moments avec mon ordinateur quand je compose…
 

« JE SOUHAITE À CHACUN DE DEVENIR GUIMAUVE. AVEC CE MÉLANGE SUBTIL DE CÉLERI, DE BANANE ET DE CHOCOLAT… »

 

Vous êtes proches ?
Après la session,  je le range dans son étui molletonné, je le caresse et l’embrasse… Ces objets vous poussent à des comportements régressifs. Dans un train, quand  on relève la tête et qu’on devient spectateur de nos contemporains, on a vraiment l’air ridicule le nez dans nos écrans. En gros, le progrès nous ridiculise, ce que je trouve bouleversant… Il suffit de voir la tête de quelqu’un qui a perdu son portable, c’est comme s’il avait perdu son papa et sa maman, et il redevient tout petit.

 

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Entretien Mathilde Delli
Photo Anaël Boulay