MAURICE LÉVY, ARTISTE DE LA COMM’ : « MONTER LA PLUS GRANDE GALERIE AU MONDE ! »

Maurice Lévy

Le grand manitou de la pub vient de lancer YourArt, une plateforme ouverte à tous les artistes, et ambitionne d’en faire « le YouTube de l’art ». Maurice Lévy nous fait les présentations.

Vous venez de lancer YourArt, votre ambitieuse plateforme mettant en relation artistes, galeries et collectionneurs. Après Publicis et Vivatech, ce sera la troisième success-story signée Maurice Lévy ?
Maurice Lévy : Avec l’équipe (Laurence Bonicalzi Bridier, ex-boss de Weborama France, en est la CEO ; Jonas Botbol, autre ancien de Weborama, le CTO ; et Jonas Lévy, le VP Product, ndlr), nous l’espérons ! La genèse de YourArt remonte à une dizaine d’années, lorsque j’ai lu un rapport d’une compagnie d’assurances dont le dernier chapitre était consacré aux artistes amateurs. Les chiffres étaient faramineux : en-dehors de la Chine et de l’Inde, il y a 50 millions de gens qui pratiquent régulièrement l’art, d’une manière ou d’une autre, et 150 millions qui le pratiquent de façon intermittente.

YourArt - Portrait Laurence Bonicalzi Bridier
L’ART POUR TOUS_
Vous rêvez de poser vos yeux sur des chefs-d’œuvre de l’art contemporain, mais vous avez la flemme de vous déplacer jusqu’à la Bourse de commerce. Pas de panique, Maurice Lévy et Laurence Bonicalzi Bridier ont la solution.


Et qui cherchent à montrer leurs créations ?
Oui, il existe d’ailleurs une frustration considérable puisque ces artistes ne peuvent souvent pas le faire. Alors, ils vont dans les foires, le long des berges pendant l’été, avec un peu de matériel, pour montrer leur travail comme ils le peuvent, de manière un peu sauvage. À ce moment-là, je me suis dit qu’il serait bien de monter la plus grande galerie au monde pour qu’ils aient la possibilité d’exposer. En 2019, j’avais un peu plus de temps (après avoir été boss de Publicis une trentaine d’années, Maurice Lévy est Président du Conseil de surveillance de Publicis Groupe, ndlr), j’en ai parlé à mes enfants.

Comment la plateforme s’est-elle alors mise en place ?
Après avoir regardé ce qui existait déjà, on s’est rendu compte qu’il y avait un créneau pour une plateforme plus ludique, plus ouverte, plus amoureuse de l’art. Quelque chose qui s’adresse à tous les acteurs, sans exception. Et surtout, en avance sur la technologie.

Cette plateforme a été lancée au mois de mai. Quels sont les premiers retours ?
Nous nous retrouvons déjà avec plus de mille artistes enrôlés directement ou inscrits par le biais de leur galerie. On constate aussi un intérêt marqué des galeries – nous en avons une cinquantaine, et pas des moindres. Enfin, le public est très curieux. Les débuts sont prometteurs.

La prochaine étape, ce seront les NFTs ?
Absolument, même si la première étape est loin d’être achevée. Il faut que YourArt s’impose comme la plateforme incontournable pour les amoureux de l’art. Et puis effectivement, la phase 2 mettra en avant les œuvres digitales, avec la possibilité d’utiliser des NFC (Near Field Communication, ndlr) et des NFTs pour valoriser et confirmer l’authenticité de l’œuvre. Le NFC sera attaché à l’œuvre et accompagné par le certificat d’authenticité.

Sont accrochées aux murs de votre bureau quelques belles pièces du XXe siècle. Quel est votre propre parcours de collectionneur d’art ?
Quand j’étais enfant, j’étais entouré de quelques œuvres intéressantes, essentiellement espagnoles. Et quand j’en ai eu les moyens, j’ai acheté dans des galeries. Et puis, progressivement, j’ai pu faire un peu de recherches, et avec mon épouse, nous avons toujours suivi des coups de cœur. On ne pensait pas à la valeur d’une œuvre ou à sa revente, nous avons toujours acheté parce que ça provoquait un « heartbeat ».

Avec YourArt, vous pensez mettre en place un accompagnement, des conseils pour les collectionneurs, comme le ferait un galeriste classique ?
La première étape sera de le faire avec des curateurs. On a mis en place tout un parcours de curation, avec pour idée de guider les non-aguerris à l’intérieur de cette plateforme. Les curateurs auront aussi pour mission d’aller trouver, au sein de YourArt, quelque chose de diversifié, tant en termes de prix que de profils d’artistes, émergents ou non. Enfin, tous les mois, un collectionneur partagera son coup de cœur pour un artiste en particulier.

Vous misez énormément sur la création de contenu (films, articles…) pour présenter au mieux tous ces artistes.
Oui, cette mise en avant est primordiale. Il y aura, dans un second temps, un jury d’experts pour choisir l’œuvre de la semaine, du mois…

La suite ?
On a bien l’intention de se développer internationalement. YourArt sera, on l’espère, le lieu incontournable pour présenter, exposer et vendre ses œuvres. L’intention est de faire en sorte que les artistes soient promus, reconnus et, peut-être un jour, adulés.

« UN MÉTAVERS OUVERT À TOUS LES ARTISTES ! »

 

Si vous vous mettez à acheter des œuvres, à constituer une collection, il va falloir un lieu physique pour les stocker…
Ça, c’est la boutique ! Ce sera l’aboutissement. Ça voudra dire qu’on a véritablement réussi et qu’à ce moment-là on aura un lieu où les gens pourront venir et admirer les œuvres. Mais il ne faut pas oublier le métavers. Tout ce que nous avons conçu jusqu’à présent, que ce soit les méta-galeries ou les musées imaginaires, toutes les solutions physiques si j’ose dire qu’on a imaginées, sont conçues en langage pour le metaverse. Ce qui fait qu’on est en 3D et que le jour où on veut passer au metaverse, ce sera très facile. Nous sommes prêts pour le métavers – un métavers ouvert à tous les artistes ! On pourra se balader dans les galeries, avec des audio-guides…

Dans quelques mois, vous pensez qu’on y sera, dans ce métavers promis par Zuckerberg et Meta ?
On se rend compte quand même qu’il y a la nécessité d’un équipement, c’est plus compliqué. Il y a déjà les nouvelles solutions de casques présentés par Apple, ou Meta, mais ça reste assez cher. Mais dans tous les cas, nous devons nous préparer à être « Web3 »… 

Vous êtes à l’origine de l’invitation d’Elon Musk à VivaTech, l’événement que vous avez cofondé. Vous disiez avant de le voir que vous ne saviez pas s’il était un bon ou un mauvais génie.
Je lui ai posé la question sur scène, pendant l’interview. Il m’a répondu : « A lil’ bit of both ».

Et Elon s’est inscrit à YourArt ? 
Pas encore ! Mais bon, je pense qu’il a les moyens de s’offrir quelques belles œuvres chez nous…

www.yourart.art


Par
Laurence Rémila
Photos Jérémie Nassif