LES STATUES BRONZENT AUSSI

COLLECTION HERITAGE PRADA
COLLECTION HERITAGE PRADA

En pleine chaleur parisienne, dans les jardins du Louvre vidés de leurs touristes, les muses de Maillol ont gentiment accepté de porter nos lunettes préférées. Les élégantes de bronze font les belles, paradent et nous observent planquées derrière leurs verres fumés telles des stars inaccessibles. Visite guidée.

Caroline Abram DIVINE
DIVINE CAROLINE ABRAM


LÉONARD & THIERRY LASRY, CRÉATEURS EN VUE : « UNE PAIRE DE GAMBLY POUR ROSELYNE ! »

Thierry Leonard Lasry

L’un à Paris, l’autre à New York, ils créent des lunettes adoptées par les stars du hip hop et de Hollywood. Ils arriveraient même à rendre Roselyne Bachelot stylée.

Vous êtes deux Parisiens. Comment avez-vous décidé de travailler ensemble sur une marque de lunettes transatlantique ?
Thierry Lasry : Ça s’est fait naturellement. La première personne en qui j’ai confiance, c’est mon frère. On a des styles qui sont complètement différents, mais on a une vision esthétique qui est similaire. On s’envoie des textos toute la journée sur des trucs d’inspiration et on se comprend sans s’expliquer.
Léonard Lasry : Thierry dessine toutes les collections, et immédiatement on commence à interagir sur ce qu’on préfère développer, ce qu’on va essayer pour une collection.
T.L : Nous ne sommes pas un duo avec un profil créatif et un financier. De manière générale, on construit, on prend des décisions ensemble, que ce soit artistique, stratégique, ou commercial. C’est la magie de la fratrie.

Thierry, vous êtes à New York, Léonard vous êtes à Paris ; est-ce que vous envisageriez de vous installer dans la même ville ?
L.L et T.L ensemble : NON !
L.L : Je suis assez attaché à la France et à la culture française particulièrement via ma carrière musicale développée en parallèle depuis le début de notre aventure.
T.L : Il y a un héritage culturel et esthétique français très important dans le produit et une grosse partie de la fabrication est faite en France. Je me définis souvent comme un new yorkais parisien. Et ça se retrouve dans les produits. Au fur et à mesure, les collections sont devenues un peu plus fortes, un peu plus massives, un peu plus « bold », comme on dit.
L.L : Ado, Thierry était déjà très américain d’esprit. Son univers hip hop a donné un léger virage à la marque, tout en étant fidèle à son esthétique de base.
T.L : Avant d’arriver à New York, la marque était 100% féminine avec l’élégance très française. Sept ans plus tard, une partie des collections a adopté la culture californienne notamment à travers les collaborations avec des marques comme Rhude, Enfants Riches Déprimés ou Dc Woo mais aussi les personnes les plus influentes sur la scène streetwear californienne. Aujourd’hui, les rappeurs de Future à Travis Scott ou Young Thug, les joueurs de la NBA comme OBJ ou Russell Westbrook, portent nos lunettes. La marque a complètement évolué, elle est plus new yorkaise que parisienne. À la base, une des raisons pour lesquelles je suis parti de la France, c’était aussi de donner une dimension globale à la marque. Quand on est à moitié à Paris et moitié à New York, on est perçu comme une marque internationale.

La semaine dernière, vous avez ouvert une boutique à New York. C’était un projet qui vous tenait à cœur depuis longtemps ?
T.L : Depuis très longtemps, mais je voulais un emplacement bien précis au cœur de Soho. J’ai tout dessiné de A à Z pour reconstituer un univers où vous avez tous mes codes, avec des archives, des livres, des BearBricks que je collectionne et plein de références dans la boutique. Je vais vous raconter une histoire. Depuis mes 13 ans, j’écoute du hip hop mais en parallèle, autour de mes 18 ans, j’avais une passion pour Charles Aznavour. À l’intérieur de la boutique, il y a un grand graff avec une citation d’Aznavour : « Le soleil brille à pleins feux, mais je ne vois que tes yeux. » Et sur la façade extérieure, la même en anglais : « Sun is shining brightly but all I can see is your eyes. » L’idée c’est de dire « À l’intérieur je suis français, à l’extérieur, je suis américain ». C’est une boutique vraiment à part et complètement différente de la boutique designée par Vincent Darré de Saint Germain à Paris, qui elle-même ne ressemble à aucune autre.

Ce qui reste présent dans vos lunettes c’est le travail de l’acétate et le design reconnaissable…
T.L : Avant, tout était dominé par les licences avec des produits qui se ressemblent et des logos partout. J’étais persuadé qu’il y avait quelque chose à faire avec des produits parfaitement fabriqués, des designs plus originaux et surtout pas de logo. D’ailleurs, en 2013, quand Fendi est venu me voir pour faire un co-branding, ils m’ont dit « ce qui est fascinant, c’est comment tu es arrivé à créer une signature sans logo ». C’est le challenge à chaque fois, d’arriver à lancer un produit reconnaissable simplement par le design, c’est toujours flatteur. Avec des artisans qui ont un savoir-faire français extraordinaire, nous sommes arrivés à travailler l’acétate d’une manière unique sur le marché. Il y a des produits excessivement complexes et il n’y a pas deux ateliers sur la planète qui sont capables de les fabriquer. C’est aussi un héritage familial. Mon père était un opticien très pointu techniquement et il m’a transmis son savoir.

Avez-vous une muse quand vous dessinez les lunettes ?
T.L : Il y a un an, le rappeur Future portait nos lunettes dans son nouveau clip et la même semaine, Hillary Clinton portait une paire. C’est le plaisir ultime que la marque arrive à avoir un spectre créatif très large. Je n’ai plus du tout une muse en tête parce que justement je veux que le client puisse s’approprier la lunette et se réinventer. Qu’il soit avocat, rappeur ou blogueur, il peut porter la lunette à sa manière.

Qu’est-ce que vous conseilleriez comme lunettes à Roselyne Bachelot, la nouvelle ministre de la Culture ?
L.L : Pour rendre visite au Président, elle peut porter une paire de Sexxxy avec les branches dorées, très chic à l’Élysée.
T.L : Il me semble que Roselyne Bachelot a de l’humour, qu’elle n’a pas peur de se faire des looks. Je la verrais parfaitement représenter la culture française à un événement avec une paire de Gambly en acétate rouge, plus massive, qui lui donnera un coté branché.

Est-ce que le confinement vous a apporté des sources d’inspiration ?
L.L : Je travaillais sur un prochain album qui a été interrompu avec le confinement. J’ai inauguré une expérience inédite pour moi, de créer, d’enregistrer chez moi et de publier dans la foulée une édition physique et digitale d’un album qui est sorti avant la fin du confinement.
T.L : Dans la mode, le calendrier de création a été cassé. Ça entraîne une restructuration mentale dans l’approche créative. Les modèles que j’ai dessinés pendant cette période ont suivi un chemin complètement différent. Ce n’était pas comme créer une collection, ça a été des micros collections qui seront lancées peut-être sous forme de capsules.

Quels projets avez-vous dans les cartons ?
T.L :
Il y a une très grosse collaboration française dont on va commencer à parler dans deux mois. Je ne peux pas vous en dire plus pour l’instant. Mais l’idée, c’est d’arriver à surprendre les gens et c’est un projet très personnel.
L.L : Ça faisait longtemps que je voulais allier l’image à mes créations et j’ai pu réaliser plusieurs vidéos avant le confinement qui sortiront à partir de la rentrée, notamment un film pour le Crazy Horse, un film pour la nouvelle collaboration de la marque aussi.

www.thierrylasry.com
40 Rue du Four, 75006 Paris
265 Lafayette Street, New York, NY 10012

 

CONCUBINY THIERRY LASRY
CONCUBINY THIERRY LASRY

 

Tod's
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Par Yagiza
Photo : Yagiza Studio