[LES ARCHIVES] QUAND TECHNIKART TRAQUAIT LES DAFT PUNK…

séparation daft punk

En 1997 la French touch bat son plein et « Technikart » traque ses avatars les plus emblématiques. Daft Punk s’apprête à casser la baraque avec « Homework », un album lancé avec des moyens réservés jusque là aux mégastars. Chronique d’une success story annoncée.


Prologue

31 décembre 1999
« – Tu sais quoi ?
– Dis toujours…
– Les Daft Punk se séparent. C’est fini ! Terminé !
– Tu déconnes ?!! J’y crois pas… J’étais encore avec Guy-Man l’autre jour et ça avait l’air d’aller… D’où tu tiens ça ?
– C’est un pote de Nova qui me l’a dit… Trop de pressions, trop d’enjeu, trop de taf’… ils ont pas supporté ! C’est la hype qui les a bouffés. Le répète pas, t’es le seul à le savoir… Garçon ! Deux demis ! »
Incroyable. La hype. Foutu de chiendent ! Toujours à traîner autour des Daft, la hype, avant ou après, devant ou derrière, mais jamais loin ! Le plus grand duo de tous les temps, notre fierté nationale gloutonnée par un parasite ? Ils auraient dû se méfier. Je les avais prévenus mais ils me prenaient pour un des ces bouffons de journaleux qui n’arrêtent pas de les harceler. C’est la faute à Bastille, au Marais, à FG, à Skyrock, à M6… C’est la faute aux médias, c’est notre faute, nous les gratte-papiers frustro-névrotiques… « Les journalistes, au lieu de retranscrire, essayent toujours de créer des tonnes de trucs qui n’existent pas », me disait Guy-Man. Conspiration. Complot. X-Files.
Leur album s’est vendu à plus de cinq millions d’exemplaires, la tournée mondiale de 98 a cassé la baraque, et puis il y a eu cette couv’ du Time, cette B.O. pour Ferrara, le papier dans Technikart, ça empêche de se séparer, non ? Ils disaient tout contrôler, ils avaient l’air si pro, serein. Ça se sépare, les Stones ? Et leur société de prod’ Daft Trax, leur société d’édition Daft Music, leur division image Daft Art, leurs labels solo Roulé et Crydamoure ? Et Virgin ? Ça marchait à fond de train pourtant. Et leurs n°1, leurs fans, la génération Daft, la house nation ? Sur quoi on va danser, nous ? L’année commence trop mal.


Chapitre 1

« Tu seras producteur, mon fils »
Naît-on Daft Punk ou le devient-on ? Atavisme ou phénomène d’acculturation ? Don de Dieu ou parcours initiatique ? Daft Punk – « les » Daft Punk comme l’a déformé la hype –, c’est Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem Christo, âgés respectivement de 22 et 23 ans. Guy-Man porte à l’index la chevalière des Homem Christo – « l’homme du Christ » –, vieille famille aristocratique d’origine portugaise. Son père, lui, porte le titre de duc et s’occupe de publications spécialisées pour l’entreprise. Papa Daniel Bangalter est un producteur qui vit en marge de l’industrie du disque. Au début des années 80, alors que les journaleux parient sur la fin du disco, Bangalter Senior lance, en forme de pied de nez, D.I.S.C.O., l’énorme hit d’Ottawan. On lui doit aussi les succès des Gibson Brothers ou de La Compagnie Créole. Daniel Bangalter me dira n’avoir jamais aidé son fils dans sa carrière. Mimétisme ? Une chose est certaine : ces gamins-là ont écouté beaucoup de musique avant d’en faire eux-mêmes. Naît-on Daft Punk où le devient-on ? Mystère de la création…


Chapitre 2

Jeudi 16 février 1995. 18h00. 
J’ai rendez-vous avec Daft Punk, chez Thomas, à Montmartre.
C’est par hasard, dans une boutique de disques, que je découvre son premier maxi quatre titres, Alive et The New Wave of New Wave, sur Soma, un petit label techno de Glasgow, l’un des meilleurs du monde. Alive sort dans les bacs au printemps 94, passe l’été dans l’anonymat, et commence tout juste depuis l’automne à se jouer en rave et à être chroniqué dans les magazines anglais. De la pure techno, brute, minimale et mentale. Très efficace, mais pas de quoi fouetter un chat… Pourtant, on parle déjà beaucoup de Daft Punk.
On m’ouvre. Immense appartement sur deux étages. Sur la gauche en entrant, une petite pièce avec quelques machines pour faire de la techno, une guitare, des câbles un peu partout, des disques et des magazines mal empilés sur le sol. « C’est là que tout se passe », me dit Thomas. Il ne s’est pas encore fait décolorer en platine ses boucles d’éphèbe antique, mais arbore déjà cette petite gueule d’ado javellisé, le teint pâle, les fringues délavées d’étudiant américain qui sentent bon la Soupline. Assis, un clope au bec, Guy-Manuel, me fixe comme un inconnu qu’on ne connaît pas et qu’on n’a pas vraiment envie de connaître. La mèche tombante sur son air pas content, il porte une paire de santiags, un jean noir et un Teddy bleu marine usé sur son polo Fred Perry de la même couleur, avec les deux bandes jaunes sur le col. Un Nick Cave miniature, anachronique et androgyne. Ashley Beedle et ma copine le prenaient même pour une gonzesse. 
Les Daft, ce jour-là, me racontent qu’ils se sont rencontrés à l’âge de 12 ans en quatrième sur les bancs du collège Carnot dans le XVIIe arrondissement ; qu’ils forment un premier duo noisy-pop à 17 ans, Darlin’ (en hommage à la chanson de Beach Boys) mais que c’est pas la peine d’en parler, qu’ils aiment encore bien le rock comme un « truc du passé » ; qu’ils aiment les raves mais pas les drogues ; qu’ils ont tiré leur nom d’une chronique d’un journaleux du Melody Maker qui traita la musique de Darlin’ de « daft punk » et que ça les a bien fait marrer sur le coup ; qu’ils se dépucelèrent avec cette vicelarde de techno en novembre 92 à la rave Soma organisée dans les salons de Beaubourg ; qu’ils ne s’attendaient pas du tout à être signés sur Soma tellement leurs morceaux sont basiques et qu’ils les ont fait « pour rigoler » ; qu’ils trouvent le temps un peu long parce que l’on ne parle du single que maintenant alors qu’ils l’ont composé en 1993, quelques mois seulement après s’être achetés du matos ; et surtout, qu’il ne faut pas s’emballer : « Nous ne sommes pas pressés. »
J’allais partir quand Thomas me propose d’écouter l’un des morceaux de leur prochain single. Il actionne un vieux magnéto à bande, la mine pétillante. Guy-Man reste impassible. Jamais je n’ai entendu un truc aussi bizarre, complexe, sophistiqué mais si évident. Impossible de savoir si j’aime ou déteste. Je crois qu’ils s’en rendent compte…

Les Daft sont au Queen, bondé comme une folle nuit de week-end.


Dix-sept mois ont passé. Nous sommes le samedi 13 juillet 1996, à Berlin, pour la Love Parade, la plus grande manifestation techno. Il est 21h40. La nuit tombe sur la place Grosser Stern, la Concorde berlinoise, transformée en un immense dancefloor.
D’impressionnants murs d’enceintes entourent la colonne surplombée de Germania, la cousine allemande de Marianne. Miss Djax vient de terminer son set. Un speaker beugle dans le micro : « Vous avez été près d’un million aujourd’hui à célébrer la techno ! » La musique reprend, à fond de cale, sur Da Funk, le fameux morceau que Thomas m’a fait écouter chez lui. Les gens hurlent et lèvent les bras, comme dynamités par un air qui réveille leurs plus profondes pulsions. La Madeleine de Proust ou la théorie de Pavlov ? Da Funk, un an après sa sortie, est l’un des hymnes de la Love Parade 96. Le maxi se vendra finalement à plus de 30 000 exemplaires en vinyles et sera réédité en décembre 1996. Le DJ enchaîne Da Funk avec… Da Funk. Hystérie générale. Un avion passe dans le ciel. Des lasers rebondissent sur l’armure dorée de Germania. Je crois que je vais gober…


Chapitre 3

Don’t believe the hype
A quand remonte la hype Daft Punk ? Et pourquoi ? Qu’a fait de si spécial le duo pour susciter un tel engouement ? Réponse : rien, à part arriver au bon moment et bien s’appliquer au travail. Déjà, avant Daft Punk, Thomas et Guy-Man laissaient perplexes leurs petits camarades d’école.
Thomas parce qu’il a une gueule d’amour et qu’il est brillant, toujours dans les premiers de la classe, et Guy-Man parce qu’il ne l’ouvre pas souvent et qu’il s’habille de façon bizarre, toujours dans le fond de la classe. Déjà, avec Darlin’, on en parlait… Quand sort en 1992 la compil’-double 45 tours, Shimmies In Super 8 sur le label Duophonic de Stereolab, le très Inrock Bernard Lenoir sur France Inter qualifie Darlin’ de « groupe noisy-pop à surveiller de très près ». OK, rien à voir avec la hype.La hype, elle, s’empare véritablement du duo à l’automne 95 pour ne plus le lâcher, quand les magazines anglais et français commencent à prendre Daft Punk pour un phénomène extraterrestre et que, dans le même laps de temps, Chemical Brothers l’invite en première partie à l’Astoria de Londres, doublé d’un cadeau bonus : remixer son succès Life Is Sweet popisé par le charlatan Tim Burgess. Ni le concert, ni le remix ne laisseront à Daft un souvenir impérissable. D’ailleurs, Chemical et Daft en concert, y’a pas photo… Mon premier s’agite beaucoup mais on se demande ce qu’il y a de live dans ce live tandis que mon deuxième, certes imperturbable, malaxe ses bécanes pour en extraire le nectar acid amerisé de basses groovy sulfureuses et de rythmiques funky-techno en constante évolution.
Parfois Thomas hoche la tête, la gueule ouverte, tend le bras, puis courbe le coude comme pour soutenir le mouvement d’une vis qui tourne dans un mur, et Guy-Man, à son habitude, reste impassible, momifié. « Je suis un peu aimanté quelque part. Je ne peux jamais réellement m’éloigner de moi-même. Question de personnalité », justifiera-t-il plus tard. Visuellement, c’est du spectacle minimum, mais, au moins, ça sonne vrai…
Mars/avril 1995 : échauffement avant le coup de bourre. Mai : premier concert au Trolleybus de Marseille puis au Rex Club, le temple techno de Paname, en forme de répétition générale. Juin : Daft va faire un petit tour en Angleterre et en Belgique. La cigale chante tout l’été, final countdown, septembre, 3, 2, 1… GO ! Le 8, les Punks sont à Strasbourg, le 9 aux Deux-Alpes en plein air où ils se gèlent les meules, la semaine suivante à Toulouse ; quelques jours après, ils inaugurent le nouvel Olympic de Nantes, l’ex-salle de cinéma préférée de Jacques Demy. A la fin du concert, les Daft, qui n’ont pas encore de roadies, démontent comme des grands leur matos et le transportent seuls jusqu’au minibus pendant qu’on les regarde comme des bêtes de foire.
Le lendemain, Daft Punk est au Zénith à Paris pour la soirée loupée de Coda, le magazine techno. Intermède avec quelques interviews, et ça repart pour la tournée anglaise : le 28 à Nottingham, le 29 au Ministry Of Sound (son et ambiance pourraves), le 30 à Glasgow dans le fief de Soma. En même temps, Thomas lance Roulé, son label solo. Banco ! Le premier maxi, Tracks On da Rocks, est en tête de toutes les play-lists de DJ’s et des médias spécialisés avant qu’il ne soit dans les bacs de disques. C’est aussi ça, la hype… En octobre, entre quelques re-interviews et les mégaraves françaises Sir. Cus, Daft continue le tour des popotes anglaises avec un faux point d’orgue le 12 à l’Astoria, en première partie des faux frères Chemical. Une vraie tournée électorale qui s’achèvera en apothéose à l’Ubu, début décembre, dans le cadre des Transmusicales de Rennes. Ce qui fera dire aux organisateurs : « C’est nous qui avons découvert les Daft Punk ! »

Le premier album de Daft Punk, c’est la grande moulinette qui malaxe trente ans de musiques teenage.


Entre-temps, Daft Punk est en live pour la soirée annuelle de la faculté Dauphine, à l’Aquaboulevard, le 17 novembre. C’est là, backstage, que le duo me donne ma première interview « officielle ». Les enchères montent, la rumeur gronde, la pression durcit, le buzz érectionne mais les Daft, eux, ce soir-là, n’ont pas franchement la trique.


Chapitre 4

Musique
Thomas : « On tourne depuis mars, on est crevés on fait des photos sans savoir pour qui… Tout ce qu’il y a autour de nous commence à trop grossir. On a arrêté le rock pour échapper à tout ce bordel et il faut maintenant que l’on se batte pour y échapper dans la techno. Depuis six mois, les Daft Punk, c’est quoi ? Une quarantaine de lives, de la promo, des contacts avec des maisons de disques et, finalement, très peu de musique… Cette année, même si on a donné quarante concerts, ça ne représente que quarante fois trente minutes de lives, soit vingt heures, même pas une journée dans l’année ! On a concentré toute notre énergie pour ne réaliser que douze minutes de musique sur un maxi et même pas une journée de live ! C’est dingue… On a été contacté par toutes les majors, sans exception, depuis trois mois. La dernière s’y est mise il y a une semaine. »
Guy-Man : « On commence à être critiqués par rapport à ça, à l’underground… Mais tous les gens que j’aime en musique, comme Stevie Wonder, Brian Wilson, Prince ou la trentaine de génies que je place au même niveau, s’ils n’avaient pas été sur des majors, je ne les aurais peut-être jamais entendus. La chance que l’on a, c’est que plein de gens s’intéressent à nous et arrivent aujourd’hui avec des biftons. On ne va pas s’en servir pour flamber ou pour se taper des mannequins, mais pour se donner les moyens de faire de la bonne musique. Nous, si on part sur une major, c’est pour qu’on nous foute la paix, qu’on nous donne de quoi faire un disque et qu’ils le sortent. »
Septembre 96. La décision est prise, ce sera Virgin. Plan d’attaque : sortie mondiale de l’album dans quarante pays, le 21 janvier 1997. Format : CD, K7 et vinyle / Premier single : re-sortie de Da Funk – Face B : extrait de la compil’ Source Lab 2, Musique / Production : Daft Trax/ Éditions : Daft Music / Coordination : Virgin France, Virgin UK et Daft Trax/ Attention : catégorie A.L.T.*/ Plan média & promo illimités / Presse autorisée mais contrôle de l’image (cf. Daft Art pour photos / Rotation radios FM maximale / Clip Da Funk : en prépa à New York / Merchandising : posters, stickers, tee-shirts et sac à dos type « petit écolier » / Tournée mondiale : en prépa / Objectif prioritaire / Bis / Objectif prioritaire N° 1 / Fin.


Chapitre 5

La Boum
Mercredi 11 décembre 96. Je viens de recevoir et d’écouter l’album-concept de Daft Punk. Il paraît que les DJs l’ont depuis le mois de septembre. Je m’en fous, je suis pas DJ… 73 minutes et 55 secondes. Sur seize titres, on retrouve quatre des six morceaux qui ont contribué au succès du duo : Da Funk, Rollin’ & Scratchin’, Alive et Indo Silver Club qui sortit sur Soma au printemps dernier sans que les mots Daft Punk n’apparaissent nulle part. Et le maxi a moins bien marché, forcément.



Saturday Night Fever ! Les Daft sont au Queen, dans le cadre des soirées Respect organisées par un journaliste des Inrocks et de Nova, pour présenter à la hype parisienne leur set mi-live, mi-mix-DJ inauguré à la rave Planète des Trans. Le Queen est bondé comme une folle nuit de week-end, sauf que là, la clientèle change un peu : résolument hétéro, jeunette et féminine. Ça gesticule dans tous les sens. A la fin du set, un discours de Martin Luther King introduit le tube house Everybody de Ruffneck. Très fort les p’tits gars… 3h50 : je pars du Queen. Dans le taxi qui me ramène, on écoute Skyrock. Il est 4h00, et c’est l’animateur Giorgio qui prend le relais. En guise de premier morceau, Da Funk de Daft Punk… Oh, putain ! I have a dream. Tout à l’heure, j’interviewe Daft Punk dans son bureau.


Chapitre 6

Jeudi 12 décembre 1996. 18h00.
J’ai rendez-vous chez eux, dans les bureaux de Daft Trax, rue Durantin. Problème : je n’ai pas grand chose à leur dire. Des souvenirs, des idées, comme des flashes, incontrôlables me reviennent… J’entends le remix de e:Cube, Disco Cubizm, qu’ils ont réalisé gratos pour Versatile, le label de DJ Gilb’R, l’un des tubes underground de cet été… Je me souviens de Rennes, cette année, où tout le monde dévisagea Thomas quand il traversa la salle VIP du Théâtre Dejazet pour se rendre à la lamentable conférence de presse. Je repense à cette foutue rentrée, à Vigipirate, et à mon overdose de Daft Punk, tous les jours, par tout le monde. Je me souviens des fêtes privées chez Philippe Levy, le photographe, où les Daft, à la cool, jouaient comme DJs et passaient de la funk et du disco… Je me dis que finalement, être sur une major, c’est une anecdote, que l’underground est mort et que le plus drôle, c’est qu’avec le disque, plus besoin de se déplacer pour aller écouter les Daft Punk… Je me dis que les Daft Punk, c’est la génération post-Walkman, qu’ils sont nés avec le format CD, qu’ils n’ont donc jamais connu l’époque bénie des 45 tours quatre titres, mais qu’ils contribuent aussi, à leur niveau, à relancer l’industrie du vinyle. Qu’ils tiennent plus de la génération Yop que de la génération ecstas. Je repense à la méga-rave Big Love d’Oxford, en octobre dernier, quand Martin James, journaliste à Muzik qui adore la scène française, me parlait de leur fabuleux live de mai dernier à la Tribal Gathering, devant plus de vingt mille personnes et que David Blot, journaliste de Radio Nova, était venu nous interrompre, fondant sur Martin pour lui dire : « J’organise des soirées au Queen. I am hyper pote with The Daft Punk, si tu veux les rencontrer, no trouble ! » Qu’a-t-il bien voulu dire par « hyper » ? « Le plus hype » ? Dans ces cas-là, il aurait dû dire, « hypest », non ?
J’y arrive, enfin. Bienvenue à Daft Trax. Bureaux flambants neufs de chez Habitat, grande cheminée prête à flamber. Ça sent le propre. Sur l’un des bureaux de la première pièce, trois ou quatre lignes de téléphone de couleurs différentes n’arrêtent pas de sonner. Les couleurs doivent correspondre au niveau d’affinité. Peut-être que l’un d’entre eux est directement connecté au PDG de Virgin… Le rouge ? Civilités. Interview. Je suis un parmi la centaine de journalistes qui les rencontrent pour leur poser des questions à la con. Thomas n’est pas concentré ; langue de bois : « Etre star, c’est une considération d’ego. Si le concept Daft Punk est un truc qui peut devenir important, tant mieux. Mais pour l’ego, on n’a pas vraiment des personnalités intéressantes à la Prince. Oui, nous voulons être reconnus, mais musicalement. »
Guy-Man parle un peu plus qu’avant, avec de longs silences entre chaque phrase. « Je savais que ça prendrait cette ampleur. Ce qui ne veut pas dire que c’est ce que je veux. » J’aime bien ce qu’il me dit. Sensible, c’est un camoufleur de joie, un rigoleur d’intérieur, un comique du moi-profond. Il s’éclate en silence, comme Emmanuelle Laborit. Mais quand il l’ouvre, ça vaut le coup. Pourtant, rien d’intéressant ne filtrera de nos discussions. Une interview de trop ?
Je me casse et il pleut sur Montmartre. Qu’est-ce que ce serait cool si cet album, si Daft Punk n’avait jamais existé… Si le rock et ses frasques, si le mythe n’était pas mort. Je rentre dans un troquet, il faut qu’j’oublie tout ça. Jusqu’ici, tout va bien. Garçon, un double bourbon !


Epilogue

Hype [‘haipe] : n.f. mot anglais qui signifie qu’un sujet ou une personne est considéré de manière artificielle et excessive, souvent influencé par les médias. Ex : La hype Daft Punk.


Par PX dans Technikart #09 paru en février 1997
Photo : Seb Janiak