BARNABÉ MONS, POP NÉO-RÉTRO : « PASSIONNÉ COMME UN DINGUE ! »

BARNABÉ

Chanteur-batteur dès l’âge de treize ans, le Lillois Barnabé Mons est passé par neuf groupes, tous barrés. Après 28 ans de carrière, il se lance enfin en solo avec Bunker Superstars. Interview première fois.

Dès tes 13 ans, tu joues de la batterie par-ci par-là pour différents groupes de Surf Music. Puis, avec tes potes vous formez Les Rippers, en 1995. Quel était votre rêve ?
Barnabé Mons : J’étais très influencé par les Cramps. Mon rêve était de faire leur première partie, ce qu’on a réussi avec Les Rippers en 1998, à L’Aéronef. J’avais 22 ans. Puis, j’ai continué à faire du rock garage, jusqu’au mois dernier… où j’ai été invité à reformer Les Gentlemen’s Agreements pour le Wild Weekend, à Majorque, un groupe psyché avec lequel on a enregistré deux albums chez Soundflat Records, entre 2012 et 2019.

Depuis 1995, tu as participé à neuf groupes, avec toujours cette forte influence sixties et psychédélique. Bunker Superstars (Monstre Sonore/Pias/Believe) est ton premier album solo. Ça fait quoi de se retrouver en tête d’affiche après 28 ans de collectif ?
Là, c’est mon disque. Un groupe, selon moi, c’est plusieurs musiciens qui se partagent la direction artistique. Cette fois, mes talentueux collaborateurs ont accepté de suivre chacune de mes intuitions. Et c’est beaucoup plus simple de défendre un projet comme ça. Là, c’est ma propre image. Et puis, on peut faire un lien avec ce que je fais à côté, avec mes expositions.

Pour la galerie Zone de Confusion (86 rue de la gare, Saint André-lez-Lille) que tu as ouverte dans les années 1990, à Lille ?
Oui. À l’origine, il y a mes parents qui sont des collectionneurs de curiosités et d’objets chargés, de sorcellerie, religieux ou d’aliénés. Ils ont commencé à faire des expositions dans les années 1970, dans deux pièces de notre maison. Ils n’ont rien à voir avec ce milieu, mon père est psychiatre, ma mère est géographe, mais c’est ainsi que je me suis fait la main, en accrochant des toiles, et en discutant des œuvres exposées avec les visiteurs. Puis, mes ambitions sont devenues plus grandes, alors j’ai commencé à faire mes propres expositions avec cette galerie, où il y a aussi des concerts et des happening.

Dans l’album Bunker Superstars, on ressent l’influence de Plastic Bertrand, que tu revendiquais déjà avec le duo que tu formais avec Cécile Jarsaillon, les Pan-Pan (2009).
Il a été super important, parce qu’il m’a aidé à écrire en français. L’anglais, que je pratiquais au départ, était une facilité pour m’exprimer sans me prendre la tête. Avec lui, j’ai perdu mes complexes. On peut faire un truc débile, qui ne veut rien dire et marrant, car tout est dans la façon dont on va le dire. Cet album suit ce que j’avais déjà fait auparavant avec le groupe Sheetah et Les Weissmüller (formé en 2001, ndlr), parce que j’avais déjà eu l’expérience d’un album très orchestré. J’aime les morceaux richement habillés, et pour cet album solo, j’ai été à fond dans cette direction. On appelle ça de la pop. Ça prend plus de temps à enregistrer, c’est plus cher, mais je pense que ça accroche mieux les oreilles.

L’album s’ouvre par le morceau « Bunker Superstars », dans lequel tu chantes : « Qui sont ces gens dans cet écran en connexion dans mon salon qui lèvent leurs verres /À l’univers complètement fichu où rien ne va plus ». L’album de la résurrection post-confinement ?
Disons que j’ai déprimé pendant le confinement. On a tous des moments où on se demande qui sont tous ces gens qui entrent dans notre champ de vision sur les écrans. Et « Bunker Superstars » raconte le moment où l’on se crée un sur-personnage, sorte de super-héros mis en scène sur les réseaux sociaux. Le morceau rend finalement un hommage un poil ironique aux apéros Facebook, si tu veux…

Pour la sortie de l’album, tu as sorti le clip du morceau « C’était l’été », une ballade bossa nova où le soleil tape fort, mais qui se passe dans ta « ville paumée du nord »…
J’adore les morceaux tristes sur un air gai. Je m’étais fait tout un cahier des charges pour l’album. Je voulais foutre une guimbarde, et c’est tombé sur ce morceau ! Je voulais retrouver la cruche électrique des 13th Floor Elevators, et je l’ai mise quelque part – à vous de la retrouver ! Je voulais aussi du sitar.

Tu as une certaine ressemblance physique avec le leader des Brian Jonestown Massacre, Anton Newcombe. On te l’a déjà dit ?
Oui ! Mais je ne les écoute pas vraiment. J’ai vu le film Dig (film documentaire sur les groupes Dandy Warhols et Brian Jonestown Massacre, par Ondi Timoner, 2004), c’est un groupe cool, mais ils n’ont pas encore sorti le morceau où je me dis que ok, c’est génial.

Une autre de tes casquettes, c’est la collection de vinyles. Il paraît que tu en as environ 15 000 – tu peux tous les citer ?
Aïe, piège. Depuis que j’ai dix ans, j’ai dû acheter 15 000 disques, oui, c’est infernal. C’est d’ailleurs grâce à cette passion semi-maladive que j’ai pu participer à la collection Wizzz ! Volume 4 pour Born Bad Records, en 2021. Y’a vingt ans, j’avais acheté le volume 1, c’était un rêve d’y participer. J’ai réussi à rassembler assez de disques pop et psychés rares et introuvables pour cela.

Qui a réalisé la pochette d’album ?
À partir d’une photo d’Élodie Fougère, on a proposé à Kiki Picasso (qui a conçu les pochettes, entre autres, d ’Elvis Costello, d ’Alain Bashung, de Starshooter, ndlr) que j’ai eu la chance de rencontrer lorsque j’ai organisé l’exposition Psychédélice, à Sète. C’est un cadeau qu’il m’a fait.

Barnabé Mons, Bunker Superstars (Monstre Sonore/Pias/Believe).

 

Par Alexis Lacourte
Photo Fred Lovino