VIVE LE CHEAP-CHIC !

Hailey Bieber

En proie à une dubaïsation des codes du luxe, les nouveaux riches s’affichent avec des créations de mauvais goût et hors de prix. Quitte à porter du luxe cheap, autant porter du cheap tout court, non ?

Légende photo : Hailey Bieber dans un ensemble gris métallisé, de sa collab’ avec Pretty Little Thing, à 83 dollars.

Fin d’après-midi un soir de semaine. Conviée à un event se voulant select’, je suis tout naturellement invitée à prendre une coupe de champagne. Curieuse de connaître la marque, je m’approche du buffet pour en voir la bouteille… Une Charles Montaine. Mais que faisait donc ce champagne aux codes pseudo-chic mais au prix relativement dérisoire (une vingtaine d’euros la bouteille de ce champ’ sans alcool) dans un bar de palace ? Une façon de séduire de nouveaux richards aux goûts pas toujours très sûrs ? Ou le signe d’une marque sortie de nulle part cherchant à se faire une place parmi les mastodontes du luxe ? Dans les deux cas, nous constatons, au fil d’événements corpo’ et de lancements loufoques, l’émergence d’une esthétique « cheap chic », aussi foireuse que touchante. Une stratégie qui persuade le nouveau riche qu’il a absolument besoin d’une Ferrari jaune taguée Alec Monopoly ou d’un champagne qu’aucun Champenois n’aurait l’audace d’acheter… 

INTÉRIEUR ROSE-BONBON

Le problème ? On doit à l’émergence de ces objets à l’allure cheap-chic la transformation du luxe en une espèce de cours de récré géante où la loi du bling règne. Magnifique exemple : les candidats de télé-réalité. Avec ses 3,3 millions d’abonnés sur Instagram, Maeva Ghennam (sorte de copie marseillaise de Kylie Jenner) s’est vantée de sa dernière acquisition – une Mercedes Class G avec un intérieur sur-mesure en cuir rose bonbon – dans une vidéo publiée le 11 avril sur son compte Insta. Une voiture alliant prix chic (200 000) et look cheap (notre poupée Barbie ne l’aurait pas reniée). La piste à suivre pour nos prochaines emplettes Insta-friendly ?

Si la mode et ses éternels revirements ont transformé l’autrefois prohibé en nouveau must-have, comment se situer, nous les parangons du bon goût ? Si l’on observe les obsessions mode du moment – les logos à outrance, les couleurs fluo, l’influence « cagole » sur des sacs à 1950 euros… –, autant l’accepter et l’embrasser : notre futur sera cheap-chic. Pourrions-nous alors nous retrouver à adorer des marques comme Guess et ses mannequins over-maquillées au blond californien ? Mieux encore, assumer notre part bimbo et s’offrir des fringues et des accessoires PrettyLittleThing, la marque préférée de nombreuses influenceuses au bronzage Casimir et aux bodys bariolés ? Car autant l’avouer : ces marques un peu maladroites, à la manière de ce vieux parent gênant qu’on ne voit qu’à Noël, n’en sont pas moins attachantes. Et on préfère leurs tentatives d’être chic – et d’échouer lamentablement – à celle des acteurs du luxe de s’affubler de marqueurs populo-criards. Des volontaires pour une sortie shopping chez Aéroville (95700) ?


Par 
Margot Ruyter