LAURENT LAFITTE : « C’EST TOUJOURS AGRÉABLE DE JOUER L’ÉLÉPHANT DANS LE MAGASIN DE PORCELAINE »

La Femme la plus riche du monde de Thierry Klifa

Laurent Lafitte revient en photographe fantasque dans La Femme la plus riche du monde, comédie dorée inspirée de l’affaire Bettencourt. Entre élégance désinvolte et provoc’ sous contrôle, le comédien joue les affreux chez les ultra-riches et s’amuse comme un fou.

La dernière fois que je vous ai vu, c’était à la fin d’une projection équipe de La Femme la plus riche du monde. En sortant de la salle, vous avez lancé et je vous cite « Mais quel film de merde ! » 
Laurent Lafitte : (Il explose de rire) Ce n’était pas sérieux, et si je l’avais pensé, j’aurais eu la délicatesse de ne pas le dire. Si je l’ai dit, c’est que c’est tout le contraire d’un film de merde (rires).

Ça vous arrive de sortir d’un de vos films et de penser cela ? 
Je peux me dire que ce n’est pas à la hauteur de ce que j’avais espéré ou du scénario. Franchement, je n’ai pas souvent été déçu. J’ai été déçu par l’insuccès de certains films, mais jamais par la qualité… 

À l’origine, le rôle – inspiré de François-Marie Bannier – ne vous était pas destiné. 
Merci d’avoir la délicatesse de me le dire… (rires) Je connais le réalisateur, Thierry Klifa, depuis longtemps et j’étais très étonné qu’il ne me le propose pas tout de suite car le rôle me donnait très envie. 

Vous avez rencontré Bannier pour vous préparer ? 
Pas du tout. J’ai regardé quelques interviews, pour capter sa diction, son articulation. J’ai posé des questions à des gens qui le connaissaient, pour vérifier la crédibilité. Puis, j’ai fait ma propre version, car le film n’est pas un biopic. 

La Femme la plus riche du monde de Thierry Klifa


Ce rôle flamboyant, c’était jubilatoire à jouer ?
C’est toujours agréable de jouer l’éléphant dans le magasin de porcelaine qui fait tout valser. Comme chez Woody Allen, le film est très dialogué, l’écriture est savoureuse, ciselée, très articulée. Le personnage est exubérant, mais il faut faire attention à ne pas trop montrer le plaisir du comédien. Il faut rester sur la ligne.

Vous avez improvisé ? 
Il a quelques moments d’impro, en fin de séquences, de petites propositions que Thierry a conservé ou pas. Par exemple, quand je mets le doigt sur le nez de Raphaël Personnaz après avoir pissé dans le jardin. Je savais que cela provoquerait une réaction chez lui. 

Et avec Isabelle Huppert ?
On avait déjà travaillé ensemble (dans Elle de Paul Verhoeven, NDR). On a construit nos partitions à deux. Et quand tu donnes la réplique à une grande actrice, ça vous tire vers le haut, et tu progresses. Elle a une telle connaissance de la caméra, d’elle-même. C’est inspirant et très stimulant..

Vous avez commencé à travailler à quinze ans, vous tournez quatre à cinq films par an. Vous apprenez encore ?
Heureusement. Je comprends de plus en plus ce que je fais. Pour ce film, j’ai pris six kilos. Mon visage est assez rond et dès que je prends un peu de poids, quelque chose s’affaisse dans mon visage et c’était parfait pour ce personnage. 

Et la perruque ?
C’est vous qui le dites que c’est une perruque. 

Donc… ce n’en est pas une ?
Je ne sais pas (rires). C’est la magie du cinéma ! 

Vous avez quitté la Comédie Française et on va vous retrouver sur les planches le 5 décembre pour… La Cage aux folles ! C’est le grand écart ! 
À la Comédie Française, c’était non-stop, les pièces s’enchaînaient. Il fallait que le théâtre redevienne quelque chose de rare, de précieux. Et puis, après Don Juan et Cyrano, j’avais un sentiment de fin de cycle. J’avais cette proposition d’Olivier Py pour jouer La Cage aux folles au Châtelet et je n’avais pas le droit d’accepter. Et moi, quand on me dit que je n’ai pas le droit de faire quelque chose… forcément, ça me donne envie de le faire (sourire). La Cage aux folles, c’est la comédie musicale de Broadway, pas la pièce, je vais donc chanter et danser. C’est un défi, une proposition extrême. L’écriture de la comédie musicale est plus politique, plus militante, elle a plus de sens en 2026. J’adore cette œuvre et j’ai hâte. 

La Femme la plus riche du monde de Thierry Klifa
En salles le 29 octobre 2025

Par Marc Godin
Photo : © Manuel Moutier