Malek, plus connu sous son nom d’artiste Vogue by Malek, est chanteur et créateur de contenus. Amateur de mode et personnalité engagée, il dépeint l’homme du futur.
Tu es passionné par la musique depuis tout jeune. En 2020 tu sors ta première chanson intitulée « Oh My Vogue ». De quoi parle-t-elle ?
Malek : De mon histoire. Celle d’un jeune garçon assez rêveur, positif, que ses parents ont éduqué de manière très bisounours. Elle parle aussi du fait qu’il faut se faire confiance. Le rêve du garçon de cinq ans est l’incarnation de ce que je suis aujourd’hui. C’est une chanson légère, sympathique et positive. Le refrain est « Oh my Vogue » qui est une référence à « Oh my gosh ».
La musique te permet-elle de te livrer entièrement ?
Absolument. C’est la suite logique de ce que je fais sur mes réseaux sociaux. Je suis un créateur de contenus qui se livre beaucoup, par choix, car j’adore raconter mon quotidien. La chanson est une partie de moi beaucoup plus sobre et profonde. C’est un art qui me sert à raconter cet aspect-là de ma personnalité.
La mode aussi peut l’être ?
C’est mon moyen d’expression numéro Un et je peux le faire d’une manière plus trash et plus cash. C’est une présentation de ma personne, un aboutissement, un amusement.
Le mot Vogue est très présent dans ton univers (titre de ta chanson, pseudo Instagram, tu appelles ta communauté les Voguepeople). Cela signifie quoi pour toi ?
C’est une célébration de soi. J’ai connu ce mot dans une vidéo de Mademoiselle Agnès dans le magazine Vogue. Elle reprenait de manière ironique la femme Figaro des années 1990. Elle expliquait tout ce qu’était Vogue et pas Vogue. C’était tellement sympa comme concept que je l’ai repris à ma manière. Tout ce qui est positif pour moi est Vogue et ce qui est négatif ne l’est pas. Ça marche pour tout : un objet, une personne, un état. Sans le définir, ce mot a une connotation mode et ça me correspond très bien. Vogue by Malek quoi ! (Rires)
Ce serait ton rêve de faire la couverture du magazine Vogue ?
Honnêtement oui. Ma sœur m’a toujours dit : « Il ne faut plus parler de rêve, mais de projet. » Ce serait un ultime projet que j’adorerais concrétiser. Vogue by Malek en couverture du Vogue magazine go go go !
Tes looks sont souvent atypiques, tu n’hésites pas à redéfinir les codes de la masculinité. Que raconte ton style vestimentaire ?
Mon parcours et mes influences. J’ai grandi en Algérie, un très beau pays aux cultures occidentales, arabo-othmaniennes, espagnole, viking, etc… J’ai observé ce style à travers toutes les générations. Je voyais ma mère et les autres femmes habillées de robes et parées de bijoux traditionnels. Enfant, ma mère et ses amies m’emmenaient dans les magasins pour choisir leurs vêtements. Mon style est un méli-mélo de tout ça, auquel s’ajoutent les films de Pedro Almodóvar et de Xavier Dolan, très colorés et aux aux looks iconiques de l’époque glam-rock en Angleterre.
Quelles sont les personnalités qui t’inspirent au quotidien ?
Camélia Jordana, toute la sphère Prince, David Bowie et Freddie Mercury sont des explosions d’inspirations. Il y a aussi des personnalités sportives comme Roger Federer et Rafael Nadal pour leur sagesse, leur côté légende. Et Troye Sivan, un artiste australien qui est une représentation du féminin/masculin, de cette masculinité moderne.
Tu as toujours osé affirmer ton style ?
Je me suis toujours habillé différemment selon les âges. En primaire, j’étais le plus vogue de tous les élèves, on me regardait d’une autre manière. Au collège, au lycée également… Et ça me plaisait.
Dans certaines situations ou lieux, as-tu eu l’impression que ton look n’était pas accepté ?
Dans mon enfance j’ai été harcelé à cause de mon style. À cet âge-là je n’avais pas la force de me défendre. Récemment, j’ai été porte-parole de la campagne Instagram sur l’harcèlement. Je ne pense pas que ce soit une question de lieux. J’ai lancé Vogue by Malek en Algérie. En 2019, je suis retourné dans mon pays, c’était une année de libération, de révolution et d’émancipation. Je n’ai eu aucun jugement sur mon look, bien au contraire. J’ai été invité par des radios, par des chaînes de télé, des gros influenceurs locaux partageaient mes contenus. Mais si, aujourd’hui, ce rêve et ces projets sont possibles, c’est grâce à mon agence Soeurette Productions. Ils ont été les premiers à croire en moi. C’est par là que Vogue by Malek prend tout son sens.
Aujourd’hui, est-ce mieux perçu d’avoir un style féminin/masculin ?
C’est beaucoup plus accessible grâce à des personnes qui se sont battues pour. Et tant mieux. Je suis très heureux de notre époque et peut-être que grâce à moi, les gens arrivent à s’assumer de plus en plus.
Selon toi, quelles sont les nouvelles formes de masculinité ?
Je pourrais peut-être l’incarner. Hier, j’étais en talons, aujourd’hui, je suis en baskets. Je suis à l’aise dans l’un comme dans l’autre, ou en portant une fourrure, une robe… Je ne me suis jamais posé la question suis-je un garçon. Je me dis que je suis un homme, mais je peux aimer la mode et le sport, avoir des cheveux décolorés et faire du foot. C’est ça la nouvelle masculinité !
De nos jours, c’est quoi être un homme ?
C’est ne pas avoir peur d’être fragile. Il faut effacer ces dogmes de l’homme qui ne doit pas pleurer, qui ne doit pas avoir besoin de réconfort, il y a des lieux précis où l’homme ne peut pas aller, des arts que l’homme ne peut pas faire, etc… Aujourd’hui, l’homme ne doit pas se bloquer, car il est avant tout un être humain avec des sentiments. Il a une sensibilité très intéressante et je pense que si on la partageait, le monde se porterait beaucoup mieux.
Tu aimes jongler avec les styles. Penses-tu que cela aide les personnes qui te suivent à s’affirmer ?
Bien sûr, surtout chez la jeune génération. Je reçois des tonnes de messages, notamment de jeunes qui viennent d’Alger car je suis très suivi là-bas, mais aussi des gens d’ici. Ils me remercient, me confient qu’ils arrivent à s’assumer grâce à moi. J’ai eu aussi, très jeune, des personnes à qui je voulais ressembler. Je trouve ça hyper sain d’inspirer cette jeune génération et je me sens très honoré de pouvoir le faire.
La jeune génération est très proche de toi. Y a-t-il des personnes plus âgées qui t’écrivent ?
Oui, notamment des mamans. Par exemple, en Algérie, des femmes non voilées comme voilées m’envoient des messages. Elles me disent qu’elles voient en moi une certaine sincérité, une acceptation que peut-être elles ont osé ou pas de faire. Elles sont aussi protectrices et me disent de faire attention, chose que la jeune génération ne me dit pas.
Tu es investi dans de nombreuses causes. Que souhaites-tu véhiculer à travers tes réseaux ?
Avec tout ce que je représente d’extravagant, mes messages restent assez simples. Il faut commencer par être vrai avec soi-même et accepter les différences. J’aimerais faire passer le message que peu importe d’où on vient, on peut avoir un rêve et avec beaucoup de croyances et un peu de travail, on peut réaliser plein de choses.
Tes trois conseils pour tous ceux qui souhaitent se libérer des codes ?
Croire en soi, même si c’est bancal. Travailler sur sa passion, sur son style, sur ce qui nous plaît le plus. Et enfin, provoquer sa chance et ne pas avoir honte. Il faut oser et faire parler de soi.
Par Gabrielle Langevin
Photos Rodrigues Loic