Vous aussi, vous n’en pouvez plus de mettre un salaire dans votre 12m2 insalubre ? Et n’avez aucune envie de déménager à Évry-Courcouronnes (on vous comprend) ? L’économiste le plus parisien de France à une proposition à vous faire.
On dit souvent que lorsque vous êtes « cadre » ou une « profession intellectuelle supérieure », vous êtes du côté des gagnants. Il est vrai qu’un cadre a un diplôme bac+5, qu’il gagne en moyenne autour de 3000 euros net par mois, ce qui est au-dessus de 75 % des salariés Français. Pourtant avec un tel salaire, il ne pourra louer qu’un appartement de 30 m2 dans Paris et acheter un 18 m2 ! On est loin de l’image du « winner de la mondialisation ». C’est le paradoxe du jeune cadre dans les grandes villes : il gagne plutôt bien sa vie, mais vit dans des petits espaces ou en colocation. Quant aux autres classes sociales, comme les employées et les ouvriers, ils ont depuis longtemps quitté la capitale.
DISNEYLAND POUR RICHES
Alors comment expliquer cette hausse des loyers dans les grandes villes ? Depuis les années 1950, les évolutions du salaire et du prix de l’immobilier, autrefois assez proches, ont commencé à se dédoubler avec une nette augmentation de l’immobilier comparé aux salaires. En résumé, les salaires augmentent faiblement et le prix de l’immobilier grimpe en flèche ce qui explique une forte perte de pouvoir d’achat des salariés dans la pierre. À quoi est due cette augmentation des prix ? En premier lieu d’une offre qui stagne, voire parfois diminue, il y a 37 millions d’habitations en France avec une évolution du parc à raison de 1 % par an, ce qui signifie que 75 % des logements de 2050 sont déjà construits. L’offre de logement augmente donc faiblement. À cela, il faut ajouter que sur des espaces bien délimités comme Paris, elle n’augmente pas ou peu, sauf si on décide de construire en hauteur – mais les Parisiens n’aiment pas les tours.
Face à cette offre stable, la demande a fortement augmenté. Premièrement, la population est passée de 50 millions en 1970 à 69 millions aujourd’hui, avec en prime une forte tertiarisation des métiers. En effet, le fait que chaque nouvelle génération fasse plus d’études a entraîné une concentration des emplois dans les grandes villes. Par exemple, plus de 90 % des diplômés d’école de commerce en France trouvent leur premier emploi en Ile-de-France. Deuxièmement, avec la globalisation, les achats d’étrangers se sont développés dans toutes les capitales du monde. Ainsi, les prix ont flambé dans certains quartiers parisiens, mais également à Barcelone et Lisbonne par exemple. Ces achats se rentabilisent d’autant plus facilement depuis que Airbnb s’est développé, ce qui a contribué à faire encore plus augmenter les prix dans les quartiers concernés. À ces achats de résidences secondaires, s’est ajoutée la concentration des richesses avec « les multi-propriétaires » – propriétaires d’au moins cinq biens – qui détiennent 40 % des logements à Paris et l’achat d’appartements consacrés uniquement à la location touristique à plein temps. Tous ces facteurs ont entraîné une baisse du nombre de logements en location sur le marché et une hausse des logements vacants. Enfin, un changement sociétal a également eu un impact important, c’est le fait qu’aujourd’hui une famille ne vit plus dans un, mais deux appartements. Pourquoi ? Parce que les divorces ont fortement augmenté. Et Paris reste en tête dans les statistiques de divorce.
De tout cela, il en résulte une pénurie de logements qui entraîne une hausse des prix à la location et à l’achat. Concrètement à Paris, la location d’un taudis peut recevoir plus de 400 dossiers et trouver un appartement devient un véritable parcours du combattant. À l’aube des municipales, il faudrait peut-être demander aux futurs candidats à la mairie de Paris comment il voit leur ville dans 20 ans : un Disneyland pour riches ? Un musée ? Ou une ville avec de vrais habitants.
Par Thomas Porcher




