COÏT CHAMANIQUE : SAUVÉS PAR LE TANTRIQUE !

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Dans la nouvelle guerre des sexes, une solution : le coït chamanique. Si vous avez du temps à perdre (comptez deux à trois bonnes heures d’exercice) et un vif penchant pour le surnaturel, voici notre guide.

Grimper au plafond sans casser les lattes de son lit ? C’est possible, grâce aux enseignements du tantra, un savoir spirituel multiséculaire venu d’Inde. Pour éviter tout risque dans votre exploration érotico-philosophique, le tout dans le plus grand des silences, il existe quelques astuces… Alors, tantra ou tantra pas ?

Le sexe, c’est comme un grand buffet à volonté, sauf que l’on mange toujours le même plat. Fast-fucking, over-dating, pornographie… votre environnement vous pousse à faire de la sexualité un plat de consommation standard, avec ses motifs récurrents et ses clichés. Entre hyper-sexualisation et tabous puritains, notre société schizophrène crée de la frustration, voire de la lassitude. Et pourtant, d’autres mets sont à la carte, avec des approches différentes de la chose. Le tantra (qui signifie en sanskrit « chaîne » ou « doctrine »), vous invite à adopter une sexualité consciente, ou plutôt, à utiliser l’énergie sexuelle pour aboutir à une expérience spirituelle inédite. Rien à voir avec les orgies « magiques » d’Aleister Crowley cependant, car l’idée-force du tantra est de sortir d’une vision génito-centrée : l’ensemble du corps est érotisable… même vos orteils. Bref, déshabituez-vous de la décharge pulsionnelle coïtale et ouvrez bien grand vos roues énergétiques.

NÉO-TANTRA

Apprendre le tantra avec un tuto Youtube serait un peu ballot, tant il existe tout plein d’autres manières d’appréhender la voie. La lecture des sutras du Vijnânabhaïrava tantra – le tantra de la connaissance – constitue une bonne porte d’entrée. Cette bible du tantra écrite au VIIIe siècle, d’inspiration shivaïste cachemirien, expose 112 méthodes de méditation, et touche des thèmes aussi éclectiques que le vide, le sommeil, la pratique des mantras ou le plaisir (kama). 90 % des productions tantriques en Europe sont occidentalisées et se regroupent sous le terme de « néo-tantra ».

Apparu durant les années 1970 dans nos contrées, le néo-tantra est un syncrétisme de tantra originel et de thérapies psycho-corporelles en vogue à l’époque (bio-énergie, rebirth thérapie, gestalt-thérapie, psychologie reichienne, etc.).

Vous voilà donc avec votre partenaire dans votre salon, et vous avez quelques rudiments de tantra. Un seul impératif, celui de la lenteur. Comme me l’explique Deva Broncy, une enseignante reconnue qui a plus de 20 ans d’expérience en la matière : « Un des outils que l’on utilise énormément, c’est la lenteur, elle permet de ressentir les énergies, comme de la chaleur, des fourmillements… Elle intensifie l’expérience et permet d’aller vers autre chose. » Un exercice préliminaire pourrait être la méditation du regard, et elle consiste, comme son nom l’indique, à se regarder dans le blanc des yeux dans un silence total. Nus ou habillés, selon votre degrés d’intimité, essayez de ne pas cligner des yeux, et au bout d’un moment, «  une vision déformée s’installe », dit-elle. « Cela permet d’avoir un échange d’énergie sans contact, il y a autre chose que du corps à corps. C’est comme du bluetooth et ça permet d’atteindre un niveau élargi  de conscience. »

Deuxième exercice, le rituel de la caresse. « L’un va caresser l’autre très lentement, toujours en silence et pendant 20 minutes minimum. Les deux personnes sont invitées à être dans une méditation, c’est-à-dire à vraiment ressentir totalement les sensations en mettant toutes leurs fenêtres d’attention sur ce qui se passe. » Une manière efficace selon elle de faire circuler les énergies, de les rééquilibrer, et d’avoir une conscience accrue de l’ici et maintenant par une grande acuité sensorielle. Cette technique a été décrite poétiquement dans le Vijnânabhaïrava tantra : « Entre dans la caresse, douce princesse ou doux prince, comme on entre dans un moment d’éternité ». Attention, votre kundalini chauffe.

FEU DANS LE BASSIN

À ce moment-là, vous pourriez être tentés de retrouver vos réflexes d’australopithèques reproducteurs. Restez concentrés. Toujours silencieusement et avec une extrême lenteur, vous pouvez proposer à votre partenaire de vous mettre l’un et l’autre en ciseau, sans pénétration, et méditer sur la zone de contact. « Le but de la manœuvre est de respirer ensemble, intensément, de manière circulaire pour réveiller le feu dans le bassin » révèle Deva. « S’il y a pénétration, elle est faite en conscience avec son partenaire, dans une parfaite écoute. Et cela doit être fait au ralenti. On est à la recherche d’une légère excitation et d’une détente. L’énergie sexuelle se répand et s’expand alors, c’est ce que l’on appelle l’orgasme de la vallée. » Cet état de détente ultime est un premier type d’orgasme tantrique.

« LE CŒUR SE REMPLIT ALORS D’AMOUR, ON EST FONDU DANS LE GRAND TOUT. » – DEVA

 

En apprenant à vibrer à la même fréquence que l’univers, vous pourrez accéder à l’orgasme total. Contrairement à l’orgasme physiologique qui est une pulsation de quelques secondes, l’orgasme total plonge l’entièreté du corps et de l’être dans une expérience de jouissance intense. Deva s’enthousiasme : « Le cœur se remplit alors d’amour, on est fondu dans le Grand Tout. Un couple peut y parvenir pendant les exercices tantriques, avec ou sans pénétration. La pénétration est plutôt ici énergétique.» Ça y est, vous êtes en plein Nirvana… Et pendant qu’avec votre partenaire vous tutoierez les étoiles, le sommeil de vos voisins n’aura connu aucun accroc. Le syndic de co-pro appréciera. 

Par Michael Petkov-Kleiner