CANNES DAY 11 : 13 JOURS, 13 NUITS

13 jours 13 nuits

À Kaboul, en 2021, les Talibans assiègent l’ambassade de France. Roschdy Zem plisse les yeux en attendant que ça se passe et le réalisateur Martin Bourboulon usine l’incident industriel de l’année.

Le film est « inspiré d’une histoire vraie », c’est écrit en format XL avant le générique. Nous sommes en août 2021, en Afghanistan. Après plus de 20 ans de combats, Joe Biden décide d’arrêter les frais et tandis que s’organise le retrait des troupes, les Talibans fondent sur Kaboul. Le commandant français Mohamed Bida, Mo pour les intimes, qui assure la sécurité de l’ambassade de France, va tenter de sauver plusieurs centaines d’Afghans réfugiés dans l’ambassade assiégée, en les convoyant à l’aéroport le plus proche…

Avec un tel pitch, on pouvait imaginer un actionner bourrin et spectaculaire, comme 13 Hours de Michael Bay, voire un Zero dark Thirty de Kathryn Bigelow made in France. Sauf que la superproduction de Dimitri Rassam est écrite par le scénariste de séries télés Alexandre Smia (Une affaire française et trois épisodes du Bureau des légendes) et le réalisateur Martin Bourboulon, déjà responsable des sinistres Eiffel ou Les Trois Mousquetaires. Les deux cadors choisissent loption suspense-mou-du-genou/drame-qui-fait-pleurer et scindent le film en deux parties : l’attente à l’ambassade, qui dure une bonne heure, avec les très méchants barbus qui les attendent la Kalach entre les dents, puis la virée en bus jusqu’à l’aéroport. Malheureusement pour le spectateur, il ne va rien se passer de plus (SPOIL ALERT) : les personnages, des clichés ambulants, débitent constamment des âneries (« les gens qui sont dehors, je sais ce qu’ils vivent, c’est l’enfer »), les acteurs tirent des gueules de constipés, et le morceau d’anthologie se résume à une grosse discussion dans un tunnel, quand le convoi français se fait arrêter dix minutes par les Talibans, avant de repartir sans un coup de feu pour l’aéroport de Kaboul. On a connu des épisodes de Derrick plus frénétiques… Bref, c’est le vide total et absolu et si le scénario est inepte, le film est enterré définitivement par Martin Bourboulon, incapable de générer la moindre tension. Comme il n’a aucune scène d’action à filmer, il lui faudrait usiner une suspense anthologique. Las, il balance des infra-basses comme Denis Villeneuve dans Sicario, de la musique qui fait pleurer dans les passages dramatiques ou de la musique vaguement liturgique quand il n’y a plus d’espoir, avec en bonus des couplets patriotiques sur l’armée et ses valeurs… Il n’y a pas un plan bien éclairé ou cadré convenablement (visiblement, l’étalonneur numérique a poussé les potards à fond), les acteurs ne sont pas dirigés et se contentent d’écarquiller les yeux (mais que sont venus faire les excellents Roschdy Zem, Lyna Khoudri et Sidse Babett Knudsen dans cette galère ?). À ce niveau là, ce n’est même plus un accident industriel, mais un nanar qui aurait coûté près de 30 millions et qui ressemble à une pauvre série Z made in Netflix.
Pour résumer l’affaire, un personnage déclare dans un éclair de lucidité« This is a total fucking nightmare ». Je n’aurais pas trouvé de meilleur résumé du film…

13 jours, 13 nuits de Martin Bourboulon
Sortie en salles le 27 juin


Par Marc Godin
Photo Jérôme Prébois/Chapter 2/M6 Films/Pathé