Qui dit Festival de Cannes dit Terrasse By Albane, le rooftop le plus couru des pros du cinéma. Avant le lancement de cette 78e édition, Albane Cleret, papesse de la Croisette depuis bientôt 25 ans, nous file ses tips… Rendez-vous le mercredi 13 mai sur le toît du JW Marriott.
Cette année, vous serez au Festival de Cannes pour la 24e fois. On a l’habitude de vous y voir en « papesse de la Croisette », mais… que faisiez-vous avant 2001 ?
Albane Cléret : Alors…. J’ai grandi à La Chapelle-en-Serval, un tout petit village de l’Oise, et c’est dans le cinéma du patelin d’à côté (le Cinedori de Orry-la-Ville, ndlr) que j’ai eu mon premier contact avec le cinéma. J’ai quitté l’école à 15 ans, mais j’ai toujours été passionnée de dessin. Plus tard, j’ai présenté un dossier dans une école de mode et j’y ai appris le stylisme, le modélisme, le travail en atelier… Ensuite, j’ai enchaîné des stages chez Lacroix, Hermès, puis décroché mon premier poste chez Stella Cadente. J’ai même lancé ma propre marque de bijoux, avant de passer de l’autre côté : l’organisation des salons et la logistique. J’ai aussi travaillé aux Bains-Douches avec Cathy et David Guetta, sur la direction artistique des événements. À l’époque, on recevait Versace, Armani, Alaïa… C’est cette première partie de vie qui m’a appris le sens du détail.
Et ensuite vous fondez votre agence…
Oui, c’était il y a tout juste 24 ans. C’est un parcours atypique, j’espère qu’il peut inspirer ceux qui, à 17 ou 18 ans, se sentent un peu perdus ou pensent que tout est déjà joué.
Chaque année, la Terrasse Bye Albane accueille les 600 personnes les plus en vogue du festival pendant toute la quinzaine, tous les jours jusqu’à 2 heures du matin. Pourquoi ce lieu est si important pour les boîtes de prod’ ?
Parce qu’on accueille, chaque jour, 4 à 5 équipes de films qui viennent se faire interviewer. Un journaliste comme toi peut y croiser l’équipe du film de Jacques Audiard d’un côté, celle de The Substance de Coralie Fargeat de l’autre, pendant qu’Isabelle Huppert parle de son dernier rôle au bord de la piscine. C’est essentiel : ça permet à tous ces gens de parler de leurs films dans un cocon élégant, pensé pour eux. Un écrin à la hauteur de ce qu’ils présentent.
Comment est née La Terrasse ?
J’ai commencé par un lounge ouvert à partir de 23 heures. En parallèle, j’étais RP de la plage Orange, partenaire du Festival. Le jour, je recevais les équipes de films sur la plage, et le soir, j’animais mon lounge. Puis je me suis dit : pourquoi ne pas créer un seul lieu qui réunit le tout ? Je voulais un écosystème où le cinéma rencontrerait la culture, le business, et surtout, l’humain. Ce projet est vraiment né d’une envie de devenir une institution à Cannes.
Votre premier événement à Cannes ?
J’avais ouvert quatre suites communicantes du Carlton pour un événement Fendi – c’était tellement réussi qu’on a ouvert cette suite pendant quatre jours après ça. Pendant lesquels, avec des amis du cinéma, on a commencé à organiser des moments improvisés. J’ai eu envie de tester des petits événements « made in Albane », voir comment les gens réagissaient… et ils ont adoré. C’étaient les prémices de la terrasse.
Comment organiser une bonne soirée selon Albane Cleret?
Tout doit être impeccable à l’arrivée du client. Ça passe par une lumière douce et raffinée, des fleurs harmonieuses, un staff soigné dans les moindres détails, de la ceinture aux chaussures. Il faut vérifier la vaisselle, la verrerie… et surtout, faire un bon test son. La musique est essentielle : elle doit être glamour et millimétrée pour créer une ambiance détendue et permettre aux gens de discuter. Quant à la cuisine, elle doit être excellente. Je suis accompagnée par Mauro Colagreco, le chef trois étoiles Michelin du Mirazur, autant te dire que tout le monde encense la cuisine de la Terrasse…
Ce qui nous a bluffés, c’est que même l’année du Covid, vous étiez là. On dit que vous étiez la seule à y croire ?
Le fameux mini-Festival de juillet [2020] ? Oui, j’y suis allée. J’étais la seule à rester. J’ai engagé des sommes astronomiques… Je me suis endettée pour le faire. Ce challenge a vraiment marqué un tournant. Je le referais sans hésiter, parce que ça a soudé mes équipes. Les plages étaient vides, et nous on était ouverts… Fallait oser !
Et cette année, qu’attendez-vous de cette 78e édition du festival de Cannes ?
Un super événement, évidemment. On parle aussi du premier film de Scarlett Johansson, du premier film de Kristen Stewart ou encore de La Petite dernière, le 3e film de Hafsia Herzi !
Comment tenez-vous le rythme festivalier, avec des journées qui commencent à 8 heures et qui n’en finissent pas ?
Dormir au moins six heures ! C’est mon seul impératif, sinon je ne tiens pas. Et surtout : je ne bois pas. Dans ce métier, si tu veux être bon, tu ne peux pas te le permettre. C’est moi la maman ici, on bosse comme une famille. Tu sais, j’ai eu deux enfants : ma fille… et la Terrasse. Et l’année prochaine, elles auront toutes les deux 25 ans.
Vous avez vu passer les plus grandes stars du cinéma international. Est-ce que ça vous émeut encore, quand vous montez sur le toit du Marriott ?
Évidemment. Quand tu penses que Scorsese, Penélope Cruz, Brad Pitt ou encore Almodóvar sont tous passés par là… C’est incroyable. Mais pendant le Festival, je suis tellement concentrée que je ne le montre pas. On dit souvent que j’ai l’air froide, mais en réalité, je suis juste très préoccupée. Pendant ces douze jours, je donne tout.
Une fête qui vous a particulièrement marquée ?
Celle organisée pour les 20 ans de la Terrasse, c’était un moment hors du temps. Le casting était fou : Iris Knobloch, Gilles Lellouche, Marion Cotillard, Isabelle Adjani, Rossy de Palma… Et ce concert duo entre Clara Luciani et Benjamin Biolay, incroyable. Maintenant, on se prépare pour les 25 ans… Il va falloir être prêt et il va aussi te falloir un très beau costume.
Vers qui je me tourne pour un smoking à la hauteur ?
Dior Homme. Ou, si tu veux rester classique et élégant, Brioni, c’est une très belle Maison. Armani aussi, évidemment, reste une valeur sûre. Voilà… tu sais où aller quand tu viens chez nous !
Entretien Max Malnuit
Photo Axel Vanhessche