Anne Hommel : « Il faut assumer la critique avec malice »

La communicante de crise Anne Hommel (DSK, la série Marseille, etc.) nous donne ses meilleurs remèdes anti-bashing.

On le voit, les polémiques naissent comme des champignons sur les réseaux sociaux et dans les médias. Est-il possible de s’en sortir indemne ?
Aucun cas n’est identique. Quoiqu’il arrive, il faut toujours mesurer l’état de la mise en difficulté car les réseaux sociaux vont vous pousser à la surréaction. Il faut avoir la bonne distance face au penchant totalitaire de ce système. Comme un bon boulanger qui se respecte, je ne vous donnerai pas ma recette mais il y a une méthodologie qui doit être respectée. Pour ma part, je veux que mes clients respectent au moins une règle. Ne jamais céder. Ne jamais s’engouffrer dans le buzz médiatique car ce serait la porte ouverte à toutes les dérives. Ne pas perdre pied à cause de trois tweets. Certains lobbies se sont professionnalisés grâce aux réseaux sociaux. Ils prônent un activisme fort, avec une grande capacité d’émotion, lié à leur propre souhait d’être vus à n’importe quel prix. C’est un totalitarisme pétitionnaire qui pousse à l’extrême indignation. Et lorsque l’on sait que la presse se nourrit de buzz, l’équation est vite mise en place !

Dans le cas de Gangsterdam comme dans celui de la campagne d’YSL, la communication de crise vous a-t-elle semblé bien ciselée ?
Je n’ai pas été engagée par l’équipe du film. Je ne sais pas s’ils ont été bien entourés. Je sais juste que dans ce genre de cas, il faut travailler l’amorce, c’est à dire anticiper la critique et l’assumer avec malice. Il faut contenir le système médiatique, sinon, dans le cas d’une polémique, c’est comme un mal de tête que vous auriez laissé monter et se propager. Cela ne sert à rien à mon sens d’inonder les médias. Dans le cas d’YSL, je pense que le silence a été une très bonne arme. Quand on ne répond pas aux réseaux sociaux, ils passent à autre chose. Ce sont comme des Gremlins qui ont besoin d’être nourris en permanence. Si vous parvenez à « clamper » l’affaire, cela finit par s’éteindre tout seul et mourir de sa belle mort. 

Mais existe-t-il de justes polémiques ?
Oui, bien entendu, s’il y a faute grave, si vous causez du tort à quelqu’un. Mais c’est à la justice ou à la gouvernance d’une entreprise de sanctionner. Ce n’est le rôle ni de la presse ni des réseaux sociaux. Mais vous savez, et ce n’est un secret pour personne, la justice est bien plus lente que Twitter.  Néanmoins, face à toutes ces polémiques, personne n’y gagne. Il faut s’interroger sur les raisons de notre présence aujourd’hui. Les médias ont besoin de vendre. Ils se servent des réseaux sociaux qui fonctionnent comme une bulle permanente, comme du lait sur le feu. Alors, après, oui, certains pourront se frotter les mains d’avoir provoqué la démission d’un patron, d’avoir descendu une campagne de publicité. Mais ce n’est que du court terme. Cela ne sert pas la démocratie qui se voit affaiblie.

ENTRETIEN NICOLAS MONIER