Et si le porno féministe mettait fin à la guerre des sexes ?

porno éthique

 SEX IS BEAUTIFUL 

Puisque le porno fait partie de l’éducation sexuelle, autant miser sur une pornographie respectueuse des femmes…. et peut-être en finir avec l’ère #metoo ?

Eteignez tout, plus un bruit, ça commence : “une scène où j’ouvre la porte pour accueillir ma copine et on commence à s’embrasser. […] La réalisatrice nous a laissées faire notre vie dans le lit, sans directions précises, c’était à nous de nous rencontrer physiquement et d’explorer nos corps ensemble. […] On a eu des moments aussi, où on a ri ensemble, où on s’est mises à chantonner “ne me quitte pas”, de Jacques Brel. […] De voir mon corps en train de faire l’amour, ça m’a paru encore plus beau de faire l’amour.”

Sur Internet, quand on tape “pornographie féministe”, on trouve pas mal de liens à cliquer, allant de sites purement porno aux articles explicatifs, interviews, classements, en passant par des vidéos Youtube telles que XX – les femmes se réapproprient la pornographie (2018), une websérie sur la pornographie féministe signée par les journalistes Annabelle Valentin et Camille Bresler

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Cela ne prouve rien, sauf si l’on regarde les dates. Toutes – ou presque, bien sûr – sont postérieures au mouvement #metoo. Celui-ci aurait donc participé à l’expansion de la pornographie féministe. Un porno bienveillant et consenti, qui prône le respect de tous les corps et désirs sexuels – notamment celui des femmes – contrairement aux standards de la profession.

Lucie, ancienne actrice de pornographie féministe, raconte : “je ne voulais en aucun cas participer au monde du porno mainstream où – moi, je suis lesbienne – par exemple dans les scènes de porno lesbien, les femmes ont l’air de juste être là pour s’exciter avant l’arrivée du mâââle.” Ce qu’elle retiendra de son expérience, c’est “[…] la bienveillance qu’il y a eue dans tout ce tournage […]. C’était comme un univers sécurisant où je n’étais pas jugée sur mon corps, sur ce que j’avais envie de faire avec Misungui, sur les pratiques à faire ensemble.”

 Comme quoi, le porno éthique, c’est possible.  “Les productions féministes partagent des aspirations communes, comme le désir de replacer les femmes au centre, maîtresses de leurs corps et de leurs sexualités,” expliquent  les auteures de la websérie XX – Les femmes se réapproprient la pornographie. C’est possible de faire un film pornographique diversifié dans les corps, égalitaire dans les plaisirs, celui de l’homme, tout comme celui de la femme…

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Corps et codes entremêlés

Le porno féministe naît autour de mai 68 et de sa révolution sexuelle. Mais son véritable essor date des 90’s, par exemple avec la parution de Baise-moi de Virginie Despentes en 1994. Un film adapté au cinéma par Despentes elle-même et Coralie Trinh Thi en 2000 : probablement le premier film porno féministe de France. 

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Mais c’est le #metoo qui apporte au porno féministe ses lettres de noblesse : en mettant les femmes sur le devant de la scène publique et/ou scène de cul. Consentement, respect, remise du mâle à sa place : les codes de l’un et de l’autre se mêlent.  

La réalisatrice féministe Anoushka confirme : “on a eu beaucoup plus de demandes d’interviews suite à ce mouvement-là par exemple, de gens qui découvraient le porno féministe.” 

Du porno féministe au lycée : LA bonne idée ?

Au départ, un porc-qu’on-balance, c’est avant tout un gamin. Un ado élevé, sans que personne ne s’en rende compte, de manière sexiste, entre le rose et le bleu, entre poupées et voiture, cliché parmi les clichés. Et quand ils matent du porno, c’est rarement sur les vidéos les plus bienveillantes envers les femmes qu’ils cliquent. 

Mais, si les parents, ainsi que les instances éducatives comme l’école primaire ou le collège s’emparaient du porno féministe pour leur offrir une alternative, peut-être pourrons-nous entrer dans une ère plus apaisée, une ère post-#metoo. 

Il ne faut pas se leurrer : c’est sur ça que les enfants vont tomber quand ils entreront dans leur phase pornhub. Les suédois Erika Lust et Pablo Dobner, pionniers du porno féministe, l’ont bien compris et ont lancé en 2017 un projet appelé « The porn Conversation » : un site dédié aux parents qui voudraient avoir « la » conversation sur le sexe avec leurs enfants. Séparé selon les âges (9-11 ans, 11-15 ans et 15 ans et plus), différents documents expliquent l’art et la manière de leur en parler. 

Utile, notamment en France où il n’y a (toujours) pas de vrai cours d’éducation sexuelle au collège,  et où on sait que les enfants peuvent tomber n’importe quand sur quelqu’un qui peut leur faire du mal. À noter : au Danemark, premier pays à avoir légalisé la pornographie, les cours d’éducation sexuelle sont obligatoires dans toutes les écoles, sous la forme d’une semaine à propos de la santé sexuelle et de la sécurité d’un rapport. Et donc ? Le Danemark possède un taux très bas d’adolescentes enceintes, d’avortements, ou encore d’infections sexuellement transmissibles. En discutant sur le thème du sexe, en le démystifiant, les danois réduisent les potentielles conséquences d’une expérience sexuelle faite très jeune.

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Bref, pas besoin d’être une brute pour prendre son pied ! Et oui, il est possible d’être hardcore, tout en veillant au consentement et au plaisir de l’Autre. C’est quand même ce qu’il y a de bien dans le sexe : lorsque c’est décomplexé, consenti et consensuel, on peut découvrir un plaisir auquel on ne s’attendait pas… allez, ce soir, essayez Sssh.com ou Notasexpert, le Pornhub éthique d’Anoushka !

Alice Claux