TECHNI-CANNES #2 : TOM CRUISE : « VOUS NE DEMANDEZ PAS A GENE KELLY POURQUOI IL DANSE OU POURQUOI IL CHANTE ? »

Mercredi 18, c’était la journée de Tom Cruise, présent à Cannes moins de 24 heures pour la tournée mondiale de son Top Gun : Maverick.

Ça vibre, ça pulse sur la Croisette, le public trépigne car c’est la journée Tom Cruise. Présent à Cannes pour moins de 24 heures, Tom, n’était pas venu au Festival depuis 30 ans. Costume bleu nuit, chemise ouverte à la BHL, il arrive du ciel, tel le Messie qui va sauver le cinéma, en hélico bien sûr. Puis vient se prêter au photocall, avec ses partenaires de Top Gun : Maverick : Jennifer Connelly, Miles Teller, et le célèbre producteur Jerry Bruckheimer qui rêvait d’une suite depuis… 1986 !

Le temps de se changer (petit pull fin qui moule ses pectoraux), Tom Cruise se rend dans la salle Debussy où l’attendent mille fans pour une discussion à bâton rompu d’une heure avec le journaliste Didier Allouch. Quand on annonce Tom, un silence quasi-religieux tombe sur la salle, avant une salve d’applaudissements. Mais c’est Thierry Frémaux qui monte sur scène et qui assure « I’m not Tom Cruise » dès fois qu’on l’aurait confondu avec la mégastar, avant de déclarer que « presque tous les films de Cruise sont bons » (tout est dans le « presque »). La lumière s’éteint et on a droit à un petit montage de dix minutes d’extraits de films de la star sur Ainsi parlait Zarathoustra de Strauss. C’est efficace, à l’image du parcours de Cruise qui a bossé avec Oliver Stone, Martin Scorsese, Stanley Kubrick, Michael Mann, Steven Spielberg, Paul Thomas Anderson… Avant d’abandonner, depuis une quinzaine d’années, toute ambition et de ne tourner qu’avec des faiseurs plus ou moins doués des blockbusters d’action où le surhomme sciento-nietzschéen sauve le monde torse nu et réalise ses cascades sans trucage (juré, promis, craché).

Plutôt humble et sympa, Tom Cruise l’a joué en amoureux du cinéma qui ne cherche qu’à apprendre, s’améliorer et offrir le meilleur spectacle possible à ses spectateurs. « J’ai toujours voulu faire du cinéma, j’ai cette passion depuis mes quatre ans. A 18 ans, j’ai un petit rôle dans Taps, d’Harold Becker. Je savais que je vivais mon rêve. George C. Scott me racontait le tournage de Dr Folamour. Je ne voulais qu’une chose : continuer à jouer toute ma vie. Je n’ai pas suivi de cours dans une école de cinéma, mais sur le plateau, je suis allé rendre visite à tous les corps de métier, la pièce des scénaristes, le département des décorateurs, et j’ai tout étudié pour comprendre. Je voulais tout apprendre, j’allais même voir les rushs. Harold Becker m’a demandé de les regarder du point de vue du public, pas en regardant seulement ma performance : et j’ai gardé ce point de vue toute ma vie ! »

Etrangement, Tom Cruise va revenir à cinq ou six reprises sur le sujet. Son besoin d’apprendre, de tout savoir, de tout contrôler pour fabriquer le meilleur produit possible pour son public. Il reprend une nouvelle fois : « j’ai constamment étudié les films, essayé de comprendre comment ils avaient été construits , écrits, du cinéma muet à maintenant. Je n’ai jamais eu peur de ne pas savoir, j’ai toujours voulu apprendre. »

Didier Allouch va essayer d’autres pistes et le lance sur les cascades. « A quatre ans, j’ai sauté de la fenêtre de ma chambre avec un parachute fabriqué à partir de mes draps. Heureusement, le sol était mouillé et je ne me suis pas tué. Pour la première fois, j’ai vu des étoiles en plein jour et je me suis dit : ‘‘Ah ! C’est intéressant’’. » Est-ce que ses cascades sont dangereuses ? « Oui ». Pourquoi il en fait ? « Vous ne demandez pas Gene Kelly pourquoi il danse ou pourquoi il chante. » On glane néanmoins quelques anecdotes. Après The Outsiders, il a refusé Rusty James (Rumble Fish, de Francis Coppola) pour… Risky Business ! Sur Eyes wide shut, il réécrivait ses scènes avec Stanley Kubrick (bah voyons) et vérifiait la lumière, et il a beaucoup appris auprès de Gene Hackman ou Robert Duvall. Il assure qu’il est entièrement dévoué au cinéma et qu’il va régulièrement en salles, au milieu du public, une casquette vissée sur la tête, et qu’il n’y avait aucune chance qu’il laisse la Paramount vendre Top Gun : Maverick à une plateforme. Il travaille exclusivement pour le grand écran. Et quand Didier Allouch lui demande s’il pense à la retraite, comme Ed Harris le demande à son personnage de Top Gun : Maverick, la réponse fuse : « Je ne pense qu’au futur, quel sera mon prochain film. »

MANCHE À BALAI, TESTOSTÉRONE ET HUGS TORRIDES

Tom Cruise se change un nouvelle fois et arbore maintenant un beau smoking immaculé pour monter les Marches. Comme rien n’est trop beau pour Tom, la Patrouille de France est venue lui faire un petit coucou juste quand il est en haut des Marches. Sur scène, il se voit offrir une Palme d’or d’honneur. Puis, le rideau se lève sur Top Gun : Maverick et la déception est à la hauteur de l’attente. Dans ce clip de propagande à la gloire de l’armée US, Tom doit former une escouade de jeunes pilotes pour une mission bien sûr impossible (faire péter un truc dans un pays de méchants). Mais est-ce que Tom va se contenter de jouer les instructeurs, alors que l’obsolescence programmée menace, ou faire voir qu’il lui en reste dans le manche à balai ? Sur ce scénario bas de plafond, Tom serre les mâchoires, sourit avec ses Ray-Ban, fait de la moto sans casque. Et botte le cul des nuisibles, avec une bande de pilotes fortement testostéronés qui se demandent en boucle qui a la plus grosse, qui est le plus fort, le plus rapide, s’affrontent torse nu au foot US, avant de se faire des hugs torrides. Il y a bien deux femmes dans Maverick, mais les scénaristes n’ont pas cru bon leur donner une personnalité ou de vrais dialogues. Il n’y en a que pour Tom Cruise qui va sauver le monde à 60 ans et prouver qu’il est bien le mâle alpha dont nous avons besoin.

LA VANNE DU JOUR

« Je vous remercie d’être venu voir mon film et pas Top Gun. »
Jesse Eisenberg lors de la présentation de son long-métrage, When you finish saving the World, lors de l’ouverture de la Semaine de la critique. 

Top Gun : Maverick, en salles le 25 mai.


Par Marc Godin