SUPER CANNES 6 : « LE FILM N’A PAS CALMÉ MES NÉVROSES, IL LES A AMPLIFIÉES »

KARIM LEKLOU

Graphiste sans histoire, Vincent inspire soudain haine et violence meurtrière chez tous ceux dont il croise le regard. Sur ce pitch génial, Stéphan Castang signe un premier film vraiment secoué. Rencontre.

Quel est votre parcours ?
Stéphan Castang : Je viens du théâtre, j’ai fait l’acteur en mercenaire pendant 25 ans mais j’ai toujours eu l’envie d’écrire et de réaliser. J’ai cinquante ans et j’ai réalisé mon premier court-métrage vers 38 ans. J’ai bossé sur des scénarios et on m’a proposé celui de Vincent doit mourir. J’ai trouvé qu’il y avait une matière, une promesse, et un mélange des genres qui me plaisait. Je trouvais également que c’était le scénario d’un névrosé et comme je le suis également, ça m’intéressait, et il y avait de l’espace pour introduire les miennes pour réaliser ce drôle de bazar. Mais je ne vais pas parler de mes névroses, elles sont sur l’écran. 

Stéphan Castang 
Stéphan Castang


Pour un premier long, c’est étrange de se lancer dans une comédie zarbi qui est aussi un film d’action, un film de zombies, une réflexion sur la violence…
C’est ce qui me plaisait, mais pour moi, Vincent doit mourir n’est pas une comédie. La situation est drôle, c’est ironique, mais les comédiens jouent le plus sérieusement possible. C’est la difficulté de l’entreprise qui m’intéressait. Pour un premier film, on a fait tout ce qu’il ne faut pas faire : la tonalité est étrange, il y a des scènes de baston, des figurants, beaucoup de décors, un chien, un bateau, des enfants… Absolument tout ce qu’il ne faut pas faire… 

Vous portez un beau T Shirt de Luis Buñuel. C’est un de vos maîtres ?
Bien sûr, avec Stanley Kubrick, Robert Bresson ou encore John Carpenter. 

Vous avez engagé Karim Leklou parce qu’il a une tête à claques ?
(Rires) C’est mon premier choix. Il me fallait des corps ordinaires – un facteur, une vieille dame, des enfants – et Karim, que j’adore, était parfait en Monsieur Tout le monde. Je voulais aussi son côté burlesque, un corps qui tente de faire face, avec ce visage placide à la Buster Keaton. 

Pourquoi Vimala Pons n’est-elle pas l’actrice numéro 1 du cinéma français ?
Je ne comprends pas, elle est juste démente, c’est une vraie artiste. Comme Karim, elle a accepté très rapidement. Nous avons beaucoup improvisé, et surtout jamais répété. À coté de Karim et de Vimala, il y a plein d’acteurs de théâtre que je connais pour une ou deux scènes.

On peut parler de la baston antholgique dans la fosse septique ?
On est chez Jérôme Bosch. Cette scène est une bascule, parce que le personnage tue. Lors du tournage, on a pris conscience de ce que l’on était en train de fabriquer, on ne pouvait pas aller en deçà. Et j’avais également un putain de chef op, Manu Dacosse, que j’ai choisi pour son travail avec Fabrice Du Welz. 

Combien de temps avez-vous tourné ?
40 jours, avec un budget de 3, 8 millions. Une des difficultés du film, c’est que nous avions beaucoup de décors, entre Lyon et sa région, et le pays de la Loire. 

Vous n’aviez pas envie de jouer dans votre film ?
Je me suis coupé. Je jouais un flic mais le film durait déjà trop longtemps et j’ai fait don de ma scène. Mais jai réalisé le film que je voulais. Et je kiffe vraiment qu’il soit à sélectionné à Cannes. C’est formidable que l’on soit à la Semaine de la critique. 

Est-ce que le film a calmé vos névroses ?
Bien sûr que non !  Au contraire, ça les a amplifiées (rires). 

Vincent doit mourir – Prochainement

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« Mais vous êtes tous tarés, en fait. »

Kubi de Takeshi Kitano


Par Marc Godin