Comme un leit motiv « It will pass » ne cesse de se répéter devant ces œuvres à la JPS Gallery. Collaborant avec le duo fraternel de galeristes, B.Wing, hongkongaise, présente sa première exposition à Paris.
« Ces derniers temps ma vie a beaucoup changé. Que ce soit en positif ou en négatif, je me suis toujours dit que cela allait passer. C’est l’émotion que je veux apporter dans mon travail. »
B.Wing a commencé à peindre à l’âge de tenir un crayon. « C’était l’unique porte de sortie pour moi car j’étais seule à la maison, ma mère était dépressive, mon père n’était pas là. J’utilisais le dessin pour aller vers le monde, délivrer un message.» Lors de son premier travail dans la mode, alors qu’elle s’ennuyait beaucoup, B.Wing a dessiné ce qui deviendrait alors sa marque de fabrique, un petit personnage nommé A-boy. « Après l’avoir dessiné, j’ai pensé : Je me suis vu en toi avant. Quand j’étais enfant j’ai toujours eu espoir d’être quelqu’un d’autre. Je ne savais pas comment me comporter avec les autres, c’est pourquoi j’ai créé cette mascotte dans mes dessins. C’est une partie de moi qui ne grandira jamais. » Développés dans différentes peintures ces 20 dernières années, mais aussi dans des livres, plusieurs de ces bonhommes sont exposés à la galerie. Pour sa première exposition en France l’artiste s’est inspirée de ses émotions « Je pense que chaque jour est une émotion différente. Je mets toujours de la musique ou de la radio, je place mon esprit dans leurs paroles, ou dans les nouvelles se passant à Hong-Kong.» La musique comme Lose Yourself d’Eminem. « Elle parle d’une personne blanche voulant entrer dans un groupe de personnes de couleur. Dans les années 90 ils ne laissaient personne y entrer. Et c’est ce à quoi je pensais lorsque je travaillais. C’est la première fois que je vais exposer ici, je ne sais pas si cela va fonctionner, mais “this is one chance, one life”. »
DE HONG-KONG À PARIS
Fondée en 2014 à Hong-Kong puis en 2018 à Tokyo, la JPS Gallery est venue cette année s’essayer au marché de l’art parisien. « Nous voulions apporter des artistes asiatiques en Europe. À cause de la ville et de la façon de vivre à Hong-Kong, les gens sont dans le rush, ils viennent 5 ou 10 minutes puis s’en vont. C’était mon premier opening à Paris hier et certains sont restés 3 heures ! » me dit Tim Yu, un des galeristes. Entre Hong-Kong et Paris, l’art de B.Wing s’inspire des couleurs d’Edvard Munch « Bien qu’il utilise des couleurs différentes, je peux toujours ressentir de la tristesse dans chaque peinture. » Dans le sous-sol de la galerie se détache une œuvre formellement, ce ne sont plus des couleurs ou des dessins mais des dizaines de I love you écrits noir sur blanc. « J’ai toujours eu envie d’aller dans la pensée de quelqu’un, cela m’intéresse beaucoup. Je pensais à ça quand je créais cette peinture. Ce que vous voyez sur le mur est une partie de mon personnage se mettant à nu. Lorsque j’étais enfant, ma mère m’emmenait au cinéma quand il y avait des tempêtes. Pendant les scènes de sexe, elle couvrait mes yeux avec sa main. Ma mère ne m’a jamais touché durant mon enfance, le seul contact dont je me souvienne est celui ci. C’était si rare, ça a laissé une trace dans ma mémoire et dans mon cœur. J’ai mis cette émotion sur peinture, et je pense que c’est ma préférée.»
Jusqu’au 17 décembre 2022.
JPS Gallery, 12 rue Notre Dame de Nazareth, 75003 Paris.
Par Mathilde Delli