Les sponsorettes d’Insta, néo-putes à clic ?

putes à clic

Et si cette fille que vous suivez sur Insta, avec ses selfies en bord de piscine, ses virées shopping et ses vacances à Dubaï, faisait partie d’une nouvelle jet-set des call-girls ?

Bienvenue dans le monde des Sponsorettes, « putes à clic » d’un genre nouveau. Début avril. xkristinaluv_37 m’ajoute sur Instagram. Zero photo, trois abonnés et 163 abonnements. Plus étrange encore : sa description, un emoji « interdit aux moins de 18 ans » et une description « Hey sweetie ! Get me here for relax ». Une fl èche indique en dessous le lien du site looksinglehotties.com. Première déception : le lien n’est plus d’actualité. Simple spam ? Lorsque je fais part de cet ajout, un ami connaisseur m’explique : « Ce ne sont pas elles les vraies prostituées d’insta. Tu as sûrement là un faux compte pour faire du phishing (récupérer des infos personnelles afin d’usurper une identité, ndlr). Les vraies call girls d’Insta sont suivies, elles, par des milliers de personnes et assument un train de vie exubérant ». Ah ? Les call girls seraient-elles aussi suivies que les plus grandes influenceuses ?

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« MANNEQUIN D’AMBIANCE »

Surnommées les « sponsorettes », ces filles entretiennent sur Instagram l’image de la parfaite bimbo. C’est le cas de Destiny. Elle poste des vidéos fitness où on la voit en string, effectuer squats et autres dips au bord d’une piscine. Elle se dit « responsable marketing ». En scrollant son profil, on en apprend énormément sur son bronzage, le velouté de sa peau, ses rondeurs bien placées. Quelques milliers de kilomètres plus loin, un roi du pétrole va lui proposer de passer quelques jours au bord des eaux chaudes du golfe, en postant une photo de son léopard racé de compagnie et sa dernière Lamborghini. Tout commence gentiment par un « Hi friend », adressé à Destiny. Puis l’échange se poursuit par des partages d’images.

Ces jeunes femmes, 25 ans maximum, se présentent comme coach en immobilier ou en fitness, barmaid, tatoueuse ou, moins ambigu, « mannequin d’ambiance », et prennent la pose en maillot de bain sur une plage paradisiaque, brandissant des sacs Louis Vuitton. Mais qui prend les photos ? Le plus souvent, leurs sponsors. Et qui sont ces bonhommes altruistes ? Selon le site Tagthesponsor (une sorte de Wikileaks voyeuriste qui s’est donné pour mission de répertorier ces instagrameuses), trois profils de sponsor dominent : « Larry, PDG d’un Hedge fund, Mohammed le Cheikh ou Dan, le footballeur professionnel. » Leur point commun : ils possèdent des fortunes. La coach en immobilier ou en fitness vous fera vite deviner (l’échange sur le prix et la nature de la prestation peut parfois être assez direct) qu’elle a autre chose à vous faire visiter qu’un T2 sans vis-à-vis ou une salle de muscu’ dernier cri. Les prestations peuvent atteindre 70 000 dollars pour passer quelques jours aux quatre coins du monde avec des hommes richissimes. La Mecque des sponsorettes ? Dubaï. Côté face, c’est l’escort classe et distinguée. Côté pile, exit le glamour, bonjour le glauque (des demandes scatos pour quelques milliers de dollars de plus). « Les Sponsorettes décident librement de recourir à des plateformes d’échange, minimise le fondateur de TagtheSponsor. Les choix qu’elles font leur appartiennent et ne nous regardent pas. »

RENDEZ-VOUS A DUBAÏ

Selon la sociologue Sylvie Bigot, il peut s’agir, « soit d’une relation de domination dans laquelle le corps de la femme est perçu comme une marchandise, soit d’une relation de service dans laquelle la sexualité devient un bien de consommation, soit d’une relation affectivo-sexuelle à durée déterminée où la sexualité est une source d’épanouissement personnel, même pour l’escort. » Si certains Cheikhs n’hésitent pas à exhiber leur bimbo dans les dining-rooms des palaces d’Orient que la clim maintient à 18 degrés, sur les plages de piscines-lagon ou sur les ponts de quelques yachts, d’autres Émirs limiteront leurs rencontres avec leur sponsorette au huis-clos d’une chambre d’hôtel.

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Quant à la domination par l’argent, les Dubaï Porta Potty en sont la plus parfaite illustration. « Pour eux ( les clients, ndlr), le corps de la femme est comme une marchandise à consommer, à dominer, et ne mérite aucun respect, aucune attention », rappelle le sociologue Saïd Bouamama. Mais le rapport de dominant/dominé est moins simple qu’il n’y parait. Sylvie Bigot a rencontré des escorts qui ont le sentiment d’inverser le rapport de pouvoir : « Elles estiment dominer leur client qu’elles réduisent à sa position de demandeur de services sexuels ». Est-ce cette nouvelle approche des choses qui permet à certaines Sponsorettes d’assumer pleinement ? En répondant aux fantasmes de leurs clients, ces femmes feront-elles changer la honte de camp ?

Hugues Pascot