GABRIEL URGELL REYES : « MES PLANTES VERTES SONT MÉLOMANES ! »

Gabriel Urgell Reyes technikart

L’éclectique compositeur franco-cubain revient avec un album sous forme de melting-pop végétal aux sonorités électro et jazz. L’occasion d’explorer avec lui son jardin pas si secret…

Vous sortez Arboretum, un luxuriant double album qui « explore les émotions humaines au travers des plantes ». C’est votre Secret Life of Plants (Stevie Wonder, 1979) à vous ?
Gabriel Urgell Reyes : Ah ah ! Ce disque, c’est plutôt la continuité de l’univers du précédent, Metaphor of Silence, dans lequel un être découvre le monde. Cette fois-ci, il entre dans un arboretum (jardin paysagiste, ndlr)  et commence à faire le lien entre les sens des plantes et la nature humaine.

Il s’agit d’un dialogue entre l’humain et le végétal ?
Complètement ! L’idée, c’est cette découverte de qui nous sommes, de ce qui nous entoure et de ce qu’on comprend de nous-mêmes via ce miroir.

Dans les années 80, on se moquait du Prince Charles parce qu’il parlait à ses plantes. Aujourd’hui, l’idée d’une communication entre l’homme et le végétal surprend moins…
On veut tous comprendre le vivant, et le respecter, notamment pour des questions évidentes d’écologie. 

Et à la maison, vos plantes écoutent quoi comme musique ?
Elles aiment beaucoup de choses différentes ! Mon univers musical a toujours été très ouvert, avec des références allant de la musique populaire au jazz. Au cours de ma formation, j’ai pu assister à des masterclass de Herbie Hancock, de George Benson, mais aussi de Daniel Barenboim…

Des compositeurs plutôt classiques, alors que votre disque recèle aussi quelques sonorités plus avant-gardistes. 
Disons que ma musique est une fusion de tous ces éléments-là. J’écoute Björk et FKA Twigs comme j’écoute les jazzmen, de Miles Davis à Brad Meldhau. J’écoute aussi de la musique classique : dans mon apprentissage musical, Richter a été un phare vers lequel je m’oriente encore aujourd’hui.

Ce qui donne des disques à écouter plus « activement », il ne s’agit  pas d’une musique d’accompagnement. ..
Pas vraiment. Comme il s’agit d’une histoire qui est racontée, l’objectif premier est d’amener les gens dans un espace différent, un peu filmographique. Et si les gens ont envie d’entendre une musique plus entraînante, il y en a aussi ! 

C’est une écoute parfaite par temps de confinement, c’est ça ?
Sérieusement ? Oui ! Avec des plages à écouter plus attentivement, et d’autres, plus « détendues ». Par exemple, dans certains titres, je propose un espace très flottant qui, pour le coup, peut être écouté en background. Mais même ces thèmes-là proposent d’autres niveaux de lecture, c’est comme un mille-feuilles.  Si les gens veulent aller plus loin, ils peuvent suivre plus attentivement l’histoire de cet être.

Au milieu de cette végétation… 
Avec toutes ces plantes et ces arbres, chacun a sa caractéristique spécifique. 

Votre projet est singulier. Vous vous sentez proche d’autres musiciens ?
Je me sens surtout proche de cette notion d’ultra-artistes qui ne conçoivent pas la musique seulement en tant qu’espace musical, mais en tant qu’espace sensoriel. Comme Christophe Chassol et Pierre Jodlowski, ou encore Arca… Vive les sens !

Arboretum (Capita & Navia),
lancement le 4 décembre à la Cité Internationale des Arts de Paris.
www.gabrielurgellreyes.com 

Par Laurence Rémila
Photo Vivi What