EN DIRECT DE CANNES : LE SACRE DE NAPOLÉON

napoléon film technikart

Fim mythique, odyssée expérimentale, le Napoléon d’Abel Gance prend d’assaut la Croisette.

La 77e édition du festival de Cannes s’est ouverte sous le signe de #MeToo, avec la présidence de Greta Gerwig, un palme d’honneur pour Meryl Streep et une Zaho de Sagazan qui massacre Modern Love de David Bowie. Parmi la première salve de films déjà diffusés, Deuxième acte, le 258e film de Quentin Dupieux, Fantômes, thriller d’espionnage sensoriel de Jonathan Millet avec notre chouchou, Adam Bessa, ou encore Diamant brut, premier long-métrage d’Agathe Riedinger qui raconte les errances d’une jeune femme attirée par la téléréalité. Pourtant, le film le plus puissant, le plus moderne, le plus révolutionnaire de Cannes a près de cent ans et c’est Napoléon ! Oubliez la catastrophe industrielle de Ridley Scott, voici la première partie de la version restaurée de sept heures du chef-d’œuvre d’Abel Gance avant la révélation de l’œuvre intégrale en ciné-concert et sur trois écrans géants, les 4 et 5 juillet, à La Seine musicale. Cette première partie de seulement 3h 40, où Gance multiplie les prouesses techniques avec une caméra en apesanteur, dévoile la jeunesse de Bonaparte, avec une incroyable séquence de bataille de boules de neige, le siège de Toulon, une poursuite à cheval hallucinée, qui enterre un siècle de westerns. Chaque plan, chaque cadrage de cette œuvre furieuse, lyrique, expérimentale, est touchée par la grâce, le génie. D’ailleurs, avant un tournage épique qui fit 42 blessés, Gance envoya ce mémo enflammé à son équipe : « Mes amis, tous les écrans de l’Univers vous attendent. À tous, collaborateurs de tous ordres, à tous, premiers rôles, seconds plans, opérateurs, peintres, électriciens, machinistes, à tous, surtout à vous, humbles figurants qui allez avoir le lourd fardeau de retrouver l’esprit de vos aïeux et de donner par votre unité de cœur le redoutable visage de la France de 1792 à 1815, je demande, mieux, j’exige l’oubli total des mesquines considérations personnelles et un dévouement absolu. » 

Après 15 ans de recherches dans le monde entier pour retrouver la version la plus complète du film et un budget de quatre millions d’euros, voici enfin cette odyssée expérimentale, dont la puissance tellurique a perduré pendant un siècle. Monumental !

 

Par Marc Godin