JOEY STARR : L’INTERVIEW 5 FRUITS ET LÉGUMES

Joey Starr technikart

Le « Jaguarr », homme de goût s’il en est, a troqué son micro pour son stylo pour devenir le rédacteur en chef du magazine gastronomique Five Starr. Entretien sur le feu.

En décembre dernier, tu as sorti ton premier magazine food, Five Starr. D’où t’es venue l’idée ?
JoeyStarr : C’est l’éditeur qui me l’a proposé, parce qu’on se voyait souvent autour d’un repas et je lui ai fait découvrir des adresses. J’ai pensé à une femme qui a écrit des recettes pour les lendemains de cuite, et ça c’est un truc que j’aurais pu faire. Du coup il m’a dit : « Mais pourquoi on n’en ferait pas un avec toutes tes adresses ? ». Même si c’est lui qui m’a insufflé l’idée, ça fait un moment que je co-produis et co-écris des magazines et des sujets à caractère social qui partent un peu dans tous les sens. J’écrivais donc déjà sur la cuisine parfois, et ce qui m’intéresse, c’est le produit et le sujet. C’est l’alibi qui fait la raison, donc l’idée pour ce magazine, c’était d’aller voir mon réseau, d’aller voir les gens qui cuisinent, que je connaissais déjà pour la plupart. 

Après Authentik, qu’est-ce que ça fait de revenir dans le monde du journalisme ? 
J’avais déjà un pied dedans. Et je tente de ne faire que des choses atypiques. Avec Laëtitia Visse par exemple, j’avais un recueil d’Hemingway avec des recettes sur les couilles de taureaux et en le cherchant, je suis tombé sur les « 10 façons de cuisiner les couilles ». J’ai envie de raconter les histoires des gens, sans me sentir journaliste.

D’où te vient cette passion pour la cuisine ? Tu dis dans ton magazine avoir eu de légers soucis de santé dus à ton alimentation, tu as eu un déclic ?  
Un déclic qui n’a pas duré, je ne suis pas du genre à tenir mes bonnes résolutions. Ça me vient de mon père, il cuisinait déjà, mais il n’avait pas le lègue facile, donc je crois que c’était dormant et ça s’est réveillé quand mon premier fils est né. J’ai réussi à faire manger de tout à mes fils. Je leur ai dit qu’il ne fallait pas croire que ce qu’ils mangeaient à la cantine était parole d’évangile. 

Pourrais-tu tester le restaurant dans le noir ? 
Oui, une fois. Je ne suis pas contre, mais pas plus. Je l’ai déjà fait dans la quasi pénombre en buvant, mais dès que tu sors et que tes sens se réveillent, tu passes dans une autre dimension. Je ne suis pas contre les expériences, je n’aime juste pas la cuisine « branlette ». Moi je dis, vive la bistronomie : j’aime bouffer, j’aime pas attendre. 

Comment cuisines-tu les couilles, toi ? 
Les couilles Rossini déjà, ça marche super bien parce qu’on est sur la base d’un plat classique. La forestière aussi, parce que mélanger avec des légumes bien cuits et de la bonne sauce, ça passe très bien. Pour ce plat, il ne faut pas aller chercher midi à quatorze heures. Ce n’est pas hyper goûteux, donc l’accompagnement fera toute la différence. 

Quel est le meilleur plat pour te préparer pour un concert ?
Je ne mange pas avant un concert, à mon grand âge, j’ai la digestion douloureuse. Avec NTM, quand on jouait le soir, je m’éclatais la panse à midi, puis je passais l’après-midi à faire une immense sieste et j’allais jouer. En revanche, il y a des gens qui ne peuvent pas manger après cette dépense d’énergie, moi, je m’envoie. Sinon, je mange du sucre, mais c’est très dangereux, j’ai réussi à maigrir en arrêtant d’en manger, c’est dire…

Et pour te préparer aux festivals ? 
J’arrive d’une époque où la spécialité c’était les taboulés, on n’en pouvait plus. 

Comment étaient les plats sur les tournages de cinéma ?
Tu veux vraiment que je me fâche avec le cinéma ? C’est horrible, tu as l’impression de faire ta star, alors que tout ce que tu demandes, c’est de manger correctement ! Je pense que la seule fois où j’ai dû bien manger, c’est quand j’ai tourné avec Gérard Depardieu. Le type avait sa cantine, c’est le packaging qui va avec lui.

Quelle est ta belle découverte dans la cuisine ?
Quelqu’un m’a conseillé une cantine constituée de repris de justice, qui se forment en même temps. Ils font des choses simples. À l’inverse de la cantine du cinéma qui nous met des féculents le midi et nous fait dormir tout l’après-midi. 

À la maison, est-ce toujours toi le maître queux ?
Ah, chez moi, tu ne touches pas à mes affaires ! Le seul, c’est peut-être Julien Duboué… Mais sinon, personne ne cuisine chez moi, tu es dingue ! 

Même pas ton fils ? 
Qu’il aille se peser, ce petit con. Une fois, sa mère m’a dit : « Tu sais que je suis rentrée et ton fils m’avait fait à manger ». C’est là que j’ai appris que ça l’intéressait. De temps en temps, on échange, mais je ne compte pas sur lui. Si tu veux cuisiner, c’est très bien, mais on va chez toi. 

Quel est le plat que tu détestes ?
Peut-être les câpres, mais ça dépend, bien mélangées je peux ne pas m’en rendre compte. Après, je n’ai pas tout goûté dans ma vie non plus. Je suis très curieux, je ne suis pas un crypto-gay, mais un hétéro-curieux. Il y a peu de choses qui me dégoûtent. La dernière fois, on m’a fait goûter des criquets déshydratés, c’est marrant avec un peu de fromage. Je suis allé en Asie, j’ai goûté les grosses chenilles, ça ne m’a pas éclaté, mais ça va. 

Jouer un cuistot dans un film ça te tente ? 
Oui bien sûr, mais il faut qu’il y ait de la consistance. Si c’est jouer un chef pour jouer un chef, il n’y a pas d’intérêt. J’ai des gens en tête, comme Stéphane Jégo, qui est tout en puissance, alors que je lui dis à chaque fois : « 3,50 mètres de gueule, 10 cm de pattes ». Mais oui, je trouve que le personnage est intéressant parce que ce sont des gens qui voyagent, qui vont à la rencontre des autres, qui sont dans différents postulats. 

Le « Jaguarr » pourrait-il envisager d’être végétarien un jour ? 
Déjà, une chose est sûre, c’est que je ne donne pas mon argent aux grandes marques pour acheter de la viande, je sais à qui je l’achète, parce que j’ai la chance de pouvoir le faire. Il peut m’arriver de faire des repas sans viande, mais végétarien, c’est pas possible, ce n’est pas dans ma nature. C’est la texture, c’est le goût… Après, je suis une vraie poubelle de table, donc s’il faut goûter, je le ferai. 

Finalement : plus musicien, journaliste ou cuisinier ? 
Musicien, un peu moins, mais toujours artiste en général ! J’ai le luxe de faire ce qui me plaît et je le fais à fond. Je vais là où mon intuition me mène. Je ne vis pas dans l’œil de l’autre, donc je me fais plaisir d’abord. 


Par 
Margot Pannequin
Photos Arnaud Juherian