GENTON, TV-MAN : AU BOIS AVEC GUILLAUME

Guillaume Genton Technikart

Abonné aux marques de luxe et aux blagues vachardes, il est l’animateur-producteur le plus énigmatique du PAF. Mais pourquoi Guillaume Genton nous a-t-il donné rendez-vous dans le Bois de Boulogne ? La réponse derrière le troisième buisson à gauche.


Il est cinq heures du matin, et cela fait vingt minutes que nous cherchons le lieu de rendez-vous, en plein Bois de Boulogne, qui nous a été donné la veille.
Nous allons y retrouver la star montante des émissions que vos amis feignent d’ignorer (elles passent sur la TNT et les participants parlent très fort). Chroniqueur atypique de Touche Pas à Mon Poste (il s’y montre tour à tour mutique, priapique et provoc’) et producteur comblé (sa boîte bosse pour tous les acteurs du PAF et emploie une trentaine de salariés), Guillaume Genton, 31 ans depuis cet été, reprend la matinale de Virgin Radio. Pour nous en parler, il nous convie donc « dans les buissons en face du camping » en nous précisant qu’il sera accompagné de Samantha et Milla, deux amies activistes du Bus des femmes, l’association qui vient en aide aux sex-workers les plus précaires. On le trouve enfin. Il avait oublié de nous préciser qu’il serait looké en total-luxe et accompagné de son chauffeur (il faut bien quelqu’un derrière le volant de la Porsche Cayenne, et Guillaume n’a toujours pas son permis). Le shooting peut commencer.

Guillaume Genton Technikart
AVEC OU SANS BULLE ?_
Maman disait de ne pas jouer avec les ballons trouvés dans le parc. Mais comme elle n’a jamais rien dit sur le Bois de Boulogne…
(Chemise Soleil Levant en soie à manches courtes CASABLANCA ; jogging molleton coton orange CELINE)


On te retrouve aux aurores dans le Bois de Boulogne. Tu y as tes habitudes ? 
Guillaume Genton : Pff, même pas – même si Cyril dit régulièrement à l’antenne que ma mère y travaille. On s’est retrouvés ici à cinq heures parce que j’anime le Morning Sans Filtre, la matinale de Virgin Radio, depuis peu, et je voulais vous montrer ce que ça fait de se lever à trois heures.

Tu reprends donc la case animée par Manu Payet sur Virgin. En quoi ta matinale sera-t-elle différente de la sienne ? 
Avec Manu, c’était une émission d’humeur et de vie quotidienne – et il le faisait très bien. Là, on a voulu changer, on ne va pas refaire ce que savent bien faire les autres. Il y aura de l’actu, des débats, je donnerai mon point de vue et je recueillerai celui des autres sur des sujets d’actualité. On va parler de ce qui fait parler dans les médias, en y apportant notre traitement.

Comme Touche Pas à Mon Poste ? 
C’est différent, tout simplement parce que je ne suis pas Cyril. Je vais le faire à ma manière. Ce qui est rassurant, c’est de voir à quel point le virage actu de TPMP a fonctionné, l’émission marche de mieux en mieux depuis qu’elle traite davantage de ces sujets-là.

Alors, quelle est la touche Genton pour traiter de ces sujets ? 
On ne les traite pas de manière aseptisée, on dit ce qu’on pense et on essaye de porter la voix des auditeurs, avec un ton qui change un peu de ce qu’on entend dans les médias traditionnels.

Revenons sur ton parcours. Tu es né en 1991, à Québec. 
Non, à Berlin.

C’est vrai ? Pourquoi y a-t-il marqué sur Wikipedia que tu es né à Québec ? 
Je ne sais pas, ce doit être un autre Guillaume Genton. Je suis né à Berlin, mon père y était attaché culturel à l’époque (à la base, il est professeur d’université). J’y ai habité trois ans et après on a déménagé à Strasbourg puis à Rennes ; mon père y enseignait la civilisation américaine.

À douze ans, tu débutes à la radio. 
Oui, j’habitais dans un hameau qui s’appelle L’Orinais, en Ille-et-Vilaine, et je m’ennuyais tellement. Il y avait une radio associative à Rennes, Radio Laser, je me suis pointé et je leur ai dit (je n’avais pas encore mué) : « Voilà, je veux faire une émission sur le rap car c’est la musique que j’écoute depuis que je suis tout petit ». Et j’ai animé une émission tous les vendredis soirs, j’ai eu la chance d’interviewer tous les artistes qui arrivaient à Rennes : Kool Shen, Oxmo Puccino, Booba… J’étais même allé voir Kanye West à Paris.

Tu l’as interviewé ? 
C’était il y a dix-sept ans, au moment de son deuxième album. J’étais allé le choper en bas de Skyrock avec mon magnéto et je lui ai posé deux, trois questions.

Combien de temps dure cette première émission ? 
Jusqu’à mes 18 ans. Elle était diffusée à Rennes puis à Strasbourg ; je l’offrais gratuitement à plein de radios locales…

Guillaume Genton Technikart
BIEN ENTOURÉ_
Guillaume avec ses BFF Milla et Samantha. 
(Hoodie oversize en cuir BALENCIAGA)


Tu avais déjà la fibre entrepreneuriale ? 
Oui, je suppose. En 2009, j’ai 18 ans, et j’anime cette émission sur RBS à Strasbourg et Europe 1 y fait une délocalisation, je fais donc la rencontre de Jean-Marc Morandini qui lance alors sa Morandini Academy sur Direct 8.

Le télé-crochet pour trouver des chroniqueurs ? 
Voilà. Je n’ai pas été pris mais ça m’a permis d’entrer dans le milieu de la production. L’émission étant produite par Endemol, j’ai commencé à bosser avec eux sur des programmes de télé-réalité, de divertissement, ainsi qu’avec TF1 Production. J’ai appris tous les métiers de la prod’ : écrire des sujets, les monter moi-même, faire du mix…

Ce qui te mènera à monter ta boîte à 24 ans. 
Comme je travaillais avec de très bons monteurs, réals et cadreurs, je commençais à me faire un réseau dans tout ce qui est production télé. Quand je monte Genton Productions en 2015, je démarre en vendant de petits sujets à NRJ 12, C8… Après, j’ai
commencé à faire des documentaires et des programmes de flux pour France télévision, Canal +. Ensuite, en 2019, j’ai monté Kennedy Agency, spécialisée dans l’habillage 3D des émissions, la création graphique, la réalité augmentée… Là, on travaille avec Amazon, Netflix, Endemol, TF1. J’ai aussi une boîte de communication pour les entreprises, Blondinet, et un studio d’édition musicale, La Gamme, spécialisé dans les musiques pour la télévision. L’idée étant de maîtriser entièrement la chaîne de production.

Ce qui te donne une maîtrise totale des coûts quand tu produis un prime ou un documentaire. 
Exactement, il fallait développer une manière de produire low-cost et de qualité qui permet de répondre à une économie toujours plus compliquée pour la télé et les médias. Pour y arriver, mes collaborateurs ont tous plusieurs casquettes : par exemple, je suis chef d’entreprise, mais aussi monteur et auteur.

Quand tu fais un docu’ de 90 minutes, ça te prend combien de temps ? 
Ça m’est arrivé de sortir des documentaires en trois jours quand il fallait rebondir sur des sujets d’actu. C’est une autre manière de faire de la télé, plus adaptée à l’économie et à la rapidité avec laquelle il faut sortir les émissions. Celui qu’on a fait sur Delarue, on était trois dessus : on l’a tourné en quatre jours et je l’ai monté en vacances, en me servant de Première, en trois jours.
 

« C’EST TRÈS IMPORTANT POUR MOI D’ÊTRE LOW-PROFILE. »

 

Grâce à tes activités de producteur, tu es devenu riche en peu de temps. Quel est ton rapport à l’argent ? 
(Il réfléchit) Je pense qu’il est sain, je ne me cache pas d’aimer l’argent – même si je me rends compte que dans la vie privée, ça pourrit les relations humaines. C’est avant tout un signe de succès dans ce qu’on fait professionnellement. J’aime le confort, mais je n’aime en aucun cas le montrer vulgairement sur les réseaux sociaux. Ce que j’aime avant tout, c’est en faire profiter autour de moi. Je trouve ça assez vulgaire d’en parler, mais si on m’interroge dessus, je réponds. Quand on m’en parle, j’en parle mais je n’ai jamais montré sur les réseaux cette voiture, telle montre, une suite d’hôtel, c’est très important pour moi d’être low-profile avec ça.

À chaque fois que je t’ai vu, tu distribuais de l’argent à des proches, un peu à la Lagerfeld.
Encore une fois, quand on a de l’argent, si c’est juste pour le montrer et écraser les autres, c’est très malsain. Je pense qu’on peut gagner de l’argent de manière noble sans mal se comporter derrière.

Guillaume Genton Technikart
PRETTY IN PINK_
Comment savoir si vous avez réussi dans le PAF ? Si vous avez les moyens de vous offrir un costard de la même couleur que votre manucure, c’est un bon début…


Sur Touche Pas à Mon Poste, les chroniqueurs répondent aux questions de Cyril avec une sorte d’honnêteté radicale, c’est un peu le pacte de l’émission. C’est au cours d’un de ces interrogatoires que tu as lâché que tu dépensais dans les 25 000 € par mois. 
J’avais dit « plusieurs dizaines de milliers d’euros », et lui s’était arrêté à 25 000 €.

J’imagine que tu y inclus le loyer de ce somptueux appart’ avec vue sur la Tour Eiffel que l’on voit parfois à l’émission ? 
Ah bah oui. Je n’aime pas l’hypocrisie de certaines personnes de ce milieu. Si vous connaissez un peu le prix des choses, vous voyez tout de suite ceux qui ont pour plusieurs centaines de milliers d’euros sur eux, et qui vont te faire la morale. 

Et donc tu es locataire de cet appart’  ? 
Ouais. Et j’ai une maison à côté de Paris.

C’est un choix, louer dans Paris plutôt que d’acheter ? 
Alors, j’ai la chance de bien gagner ma vie, mais je ne suis pas du tout économe, je suis extrêmement dépensier. Quand je suis arrivé à Paris, j’habitais dans un 6 m2 et je gagnais 400 € par mois, et c’était différent, mais j’étais heureux. Aujourd’hui, je dépense dans des voyages, dans des restos, je suis un bon vivant mais avoir des millions sur mon compte ou dans de l’immobilier, ça ne m’intéresse pas.

Ce qui te reste de tes débuts ?
Je disais oui à tout, et j’ai toujours du mal à dire non aujourd’hui. Quand tu démarres, tu ne peux pas refuser des clients. C’est marrant, dans le documentaire sur Kanye West sur Netflix, on voit le début de sa carrière. Le mec, c’est un crevard, il veut distribuer ses prods à tout le monde, il veut exister en tant que rappeur… Il ne faut pas oublier qu’au début, on prend toutes les opportunités, il ne faut pas en avoir honte

Comment t’es-tu retrouvé à intégrer la bande de Cyril Hanouna ? 
Hanouna m’a entendu à la radio et m’a envoyé un texto : « Salut Guillaume, est ce qu’on peut se rencontrer ? ». J’ai dit oui et il m’a reçu dans son bureau. Pendant l’entretien, il m’annonce qu’on fera de grandes choses ensemble.

C’est un truc qu’il dit à tout le monde ? 
Je ne sais pas. En tout cas moi, au moment où il me l’a dit, je n’y croyais pas. Mais il se trouve que ça fait cinq ans qu’on travaille ensemble dans la production et à l’antenne. Il est très fidèle, il ne lâche pas les gens. Grâce à lui, j’ai fait beaucoup de documentaires, j’ai produit des programmes, je suis dans TPMP tous les soirs, je présente la matinale de Virgin… À mon petit niveau, ce sont de grandes choses.

Tes débuts sur TPMP ? 
J’ai fait deux apparitions en 2017, cinq ou six en 2020 et c’est fin 2020 qu’il a commencé à me mettre tous les jours. Je ne m’y attendais pas du tout, j’étais plutôt dans la production de l’émission : magnétos, sujets, récap, voix off…

Tu y es tous les soirs mais tes prises de parole sont relativement rares. 
C’est un show en direct de trois heures, il faut écouter tout ce qui se dit. À tout moment, il faut être prêt à rebondir, à faire des blagues, à poser les bonnes questions… Quant à moi, j’essaye de ne pas parler pour ne rien dire ; si c’est pour avoir des interventions tièdes, ça ne sert à rien.

Tu as aussi ce rôle un peu sursexué parfois. 
Ah, bon ?

Quand tu dragues la mère d’un autre chroniqueur à l’antenne, par exemple. C’est un rôle que tu joues ? 
C’est le vrai moi, mais de ma vie d’avant. Aujourd’hui, j’ai changé. je me suis rangé, je suis en couple, j’ai une copine et ça se passe très bien, merci. Après, je ferai toujours des blagues à l’antenne comme je pourrais en faire avec mes amis…

Morning sans filtre, tous les matins de 6 heures à 9 h 30 sur Virgin
TPMP, tous les jours à 18h10 sur C8


Entretien Laurence Rémila
Photos Naïs Bessaïh