COMMENT SUPREME A PERDU SON COOL

supreme marque cool ?

Alors que l’ex-marque préférée des skateurs stylés traverse une mauvaise passe, Pharrell triomphe avec un Louis Vuitton Homme réincarné en version couture de Supreme. Un transfert de cool irréversible ?

Et si on mettait en parallèle la récente dégringolade de Supreme dans le baromètre des modeux (mais aussi dans ses ventes, avec une baisse de 7 % de son CA pour 2023) avec la tout aussi récente transformation de Louis Vuitton en « marque de culture » drivée par Pharrell Williams a.k.a. « Skateboard P » (sa première collection contenant quelques beaux tropismes skate). En prenant un peu de recul, on a l’impression que Surpeme s’est fait coopter son âme en 2017, lors de la collab’ entre la « petite » marque skate new-yorkaise et la grande maison française, se faisant ensuite entraîner dans une spirale infernale de collabs malencontreuses qui rapportaient beaucoup – dans un premier temps.

C’est d’ailleurs juste après cette collab que le virage streetwear de la haute-couture se confirme, quand un certain Virgil Abloh prend la tête de la collection homme de Louis Vuitton, en 2018. Il est alors connu pour sa marque Off-White – dont le logo avait été « inspiré » par une marque de skate, H-Street. Virgil créera la première chaussure de skate Vuitton – avec le skateur Lucien Clarke. Dans cette affaire, le skate est partout.

Côté Supreme, dans la foulée du méga-coup de 2017, son fondateur James Jebbia vend la moitié de ses parts au groupe Carlyle pour 500 millions. La marque active alors la machine de guerre des collabs les plus craignos, encaisse un max de pognon, puis revend Supreme pour 2,1 milliards à VF Corp (Vans, The North Face, ou Timberland) en 2020. C’est le début de la fin. En 2023, les ventes ont baissé (en mars, les bénéfices nets avaient chûté de plus de 20 %), l’époque des queues devant les magasins est terminée, et tout le monde annonce l’hyper-déclin de Supreme. Et pendant ce temps, Louis Vuitton Homme semble s’être transformé en Supreme version couture.

Les indices de cette « Supremisation » lors du grand défilé du Pont Neuf ? Il y a déjà cette pub géante starring Rihanna, avec au premier plan un sac rouge vif siglé du monogramme Vuitton. Un rouge qui rappelle drôlement une certaine collab de 2017… De l’aveu de Pharrell, ce sac et sa couleur vive ont été inspirés, comme tout le reste de la collection, de « Canal Street ». Canal Street ? Une rue de Manhattan située à deux pas du premier shop Supreme. Et que penser du journal fait en parallèle du défilé, en partenariat avec le New York Times ? Déjà fait en 2018 par Supreme, avec le New-York Post

Autre signe encore, le compte Insta de référence SupremeLeaksNews, qui ne poste que des sorties Supreme, Palace, Stussy, etc., a fait plusieurs posts sur le défilé Vuitton. Dans les commentaires, on lit : « Supreme x LV Part II », ou encore « Copping Supreme ». Mais ce transfert de hype marque-t-il la fin du cool pour Supreme ? Non !

DONNÉ POUR MORT ?

Car la marque semble se réaligner sur ses valeurs et sa culture d’origine, le skate et l’underground. Qui fait tout son poids culturel… Depuis peu, on retrouve des collabs excitantes – même Kim s’est remise à porter la marque (voir photo) –, comme avec la marque de skate Hardies, le collectif Bernadette Corporation, ou encore avec le pêcheur HoodFishing Entertainment. Si VF Corp planchait sur 600 millions de dollars de recettes pour l’exercice de cette année, Supreme n’a atteint que 523 millions… Si ce chiffre passe en dessous des 300 millions, Supreme pourrait bien redevenir aussi cool qu’à ses débuts. C’est tout le mal qu’on leur souhaite.

 

Par Jean-Baptiste Chiara